Un mal nécessaire [ft Robyn Patel]

Un mal nécessaire

feat @Robyn Patel

An 1000, Lune 8, Jour 7

“Nous voilà à destination, nos chemins se séparent ici. Encore désolé pour ce long détour, croyez bien que j’aurais voulu vous l’épargner.” Lui avait d’abord dit la quarantenaire avec un sourire gêné.
“Ne vous en faites pas, ce n’est rien, c’est déjà très gentil de m’avoir amené jusqu’ici.”

À ces paroles, Hevlaska était descendu de la calèche marchande qui s'était mise à l’arrêt au détour d’une intersection. Elle s’était retournée vers sa conductrice, qui s’était de nouveau adressée à elle pour quelques dernières indications.

“Pour la Citadelle, on doit être à un peu plus de 30 km environ. Dirigez - vous vers le sud. Si tout va bien, à pied, vous y serez d’ici demain.”

La Zora avait grandement remercié la marchande, qui avait repris sa route avec sa cargaison. Prenant la direction indiquée, Hevlaska avait entrepris ce qu’elle espérait être la fin de son périple en direction de la Citadelle d’Hyrule.

Elle avait quitté Lanelle trois jours et demi plus tôt. Bien qu’elle aurait pu rapidement s’y rendre à la nage, la naïade avait privilégié la terre ferme dans son objectif de retrouver son père. Elle avait déjà une piste vers Cocorico, mais depuis des lunes qu’il avait disparu, il pouvait être n’importe où. Si elle pouvait le trouver sur le chemin de la citadelle, elle préférait ne pas le louper bêtement. Très vite, elle avait regretté de ne pas avoir pensé à prendre de cheval pour son voyage, toute pressée qu’elle pouvait l’être de quitter Lanelle. Elle avait alors croisé la route de la marchande. Celle - ci se dirigeait vers Portua, mais avait gentiment accepté de la rapprocher au maximum de la citadelle. En chemin, des voyageurs les avaient avertis de monstres grouillant sur le chemin qu’elles souhaitaient emprunter, les forçant à un détour. Sa bienfaitrice lui ayant avoué ne pas être une grande combattante, il était hors de question pour Hevlaska de prendre des risques inutiles. Ainsi, elles avaient convenu de continuer ensemble jusqu’à arriver à mi - chemin entre la citadelle et Portua. Maintenant, Hevlaska souhaitait que la marchande puisse parvenir sans encombre à destination.

Après un bout de temps de marche, la naïade avait perçu le son d’une rivière non loin d’elle. Comme elle avait laissé ses derniers poissons à la femme pour la remercier d’avoir facilité son voyage, ce cours d’eau était pour elle l’occasion de se poser un instant pour en pêcher de nouveau. Cela tombait à pic, car elle se rendait également compte qu’elle avait faim. Ni une ni deux, elle n’avait pas perdu de temps et s’y était dirigée. Une fois au bord de l’eau, elle avait pris quelques instants pour distinguer l’emplacement des animaux aquatiques, et avait fini par en distinguer quelques-uns dans une zone peu profonde.

Afin d’être plus à l’aise, elle avait déposé quelques-unes de ses affaires par terre. Elle n’avait pas spécifiquement cherché à les organiser pour le moment, décidant qu’elle le ferait après sa session de pêche. Dans le lot d'affaires, elle avait déposé un bracelet fait de coquillage et d’argent, assez en évidence pour ne pas oublier de le remettre plus tard. Ce bijou lui venait de sa mère, qui le lui avait donné avant son voyage dans l’espoir de lui porter chance, et la demoiselle ne tenait pas à le salir.

Attrapant sa lance, elle s’était immiscée dans l’eau et s’était dirigée vers ses proies le plus discrètement possible. Si tout se passait bien, il lui suffirait simplement d’en embrocher un ou deux au bon moment.

Un mal nécessaire

feat @Robyn Patel

An 1000, Lune 8, Jour 7

Après un moment de concentration, elle avait planté son arme dans l’eau, puis l’en avait sorti pour contempler sa prise. Et de deux d’un coup ! Deux perches qu’elle se ferait un plaisir de consommer, et largement suffisant pour la nourrir un moment. Elle en avait vu une troisième s’enfuir, et avait décidé de la laisser tranquille malgré la tentation de l’emporter pour plus tard. Même si elle aurait pu partir à sa poursuite, elle n’avait pas non plus envie de trop s’éloigner de ses affaires laissées sur la berge.

Elle était retournée auprès de son paquetage avec sa prise, et était sortie de l’eau. Mais alors qu’elle s'apprêtait à organiser un peu mieux ses affaires, un détail avait attiré son attention : son bracelet n’était plus là où elle l’avait posé. Fronçant les sourcils, elle avait d’abord songé qu’il avait peut-être simplement glissé au sol. Elle avait alors cherché par terre, soulevant même son sac pour voir en dessous, mais toujours aucune trace du bracelet.

“C’est quoi ce bordel ?” Avait - elle grommelée en continuant ses recherches.

Bien qu’elle tentait de ne pas céder à la panique, l’inquiétude de ne pas trouver le bijou se faisait sentir. Elle en était même à fouiller dans tous les recoins de ce qu’elle avait emporté, jusqu'aux poches de son sac ou de ses vêtements, malgré le fait qu’elle soit sûre de ne pas y avoir rangé le bracelet. Au bout d’un temps de recherches infructueuses, elle avait pourtant dû se rendre à l’évidence : le bijou n’était plus là. Au vu des circonstances, l’explication la plus probable à ses yeux était qu’on le lui avait volé. Purement et simplement.

“Et merde !” Avait - elle laissée échapper par frustration.

À y réfléchir, elle se sentait quelque peu idiote. Elle avait laissé ses affaires sans surveillance, d’autant plus dans une région qui lui était inconnue. Qu’est-ce qui lui était passé par la tête pour être aussi imprudente ? Pour peu, elle aurait même pu se faire voler sa lance si elle ne l’avait pas prise pour pêcher ! Mais se morfondre ne réglerait pas le problème, son bracelet n’était plus là et ne lui reviendrait pas tout seul comme par magie.

Pour se calmer un peu et se remettre les idées en place, elle avait fermé les yeux et avait pris une grande inspiration, avant d'expirer. Si quelqu’un lui avait effectivement volé son bracelet comme elle le supposait, il y avait une chance pour que le/la voleur.se ne soit pas encore parti très loin, et Hevlaska pouvait donc espérer le.la retrouver. Il s’agissait peut-être d’un espoir futile, mais la jeune femme tenait bien trop à ce bijou pour ne pas avoir le fin mot de l’histoire. C’était décidé : elle retrouverait l’auteur.e de ce méfait !

Décidant que son repas pouvait attendre, elle avait rangé toutes ses affaires (dont les deux poissons qu’elle avait décrochés de sa lance), et en avait profité pour chercher des indices. C’est en terminant son inventaire qu’elle avait remarqué la flèche plantée dans le sol, ustensile qui ne lui appartenait pas, avec quelque chose qui y était accroché. D’abord dubitative, elle avait pris l’objet entre ses doigts pour l’examiner un peu. Une espèce de carte de visite, sans doute. Elle ne trouvait pas ça très malin de laisser ainsi une trace de son méfait, mais elle se faisait aussi la réflexion que c'était peut - être plus pour la narguer qu’autre chose. Et bien soit, cela restait un indice et c’était toujours mieux que rien ! Si quelqu’un avait déjà vu ça, elle pouvait toujours poser des questions pour remonter la trace du petit malin qui lui avait subtilisé son bijou.

Elle s’était donc préparée à partir, quand une réflexion lui avait traversé l’esprit : se pouvait - il que l’auteur.e du délit soit encore dans les parages, à observer les conséquences de son larcin ? L’hypothèse n’était pas si improbable que ça, et si tel était le cas, il valait mieux qu’elle s’en assure. Elle avait alors pris un temps pour observer l’environnement autour d’elle, avant que son attention ne soit attirée par des buissons aux ombres suspectes. Elle s’était prudemment approchée de l’endroit, tenant fermement sa lance entre ses mains, à l’envers, pommeau en avant. Cette posture, bien que pouvant prêter à confusion, était surtout un moyen de ne pas transpercer le potentiel être vivant qui se cachait dans les fourrés. Elle tenait à récupérer son bien, pas à commettre un meurtre inutile.

Une fois assez proche de l’endroit, elle avait donné un coup sec dans les broussailles avec le pommeau de son arme, et avait attendu de voir si cela allait provoquer une quelconque réaction.

Un mal nécessaire

feat @Robyn Patel

An 1000, Lune 8, Jour 7

Elle aurait pu laisser tomber, se résigner, prendre ses cliques et ses claques, puis reprendre sa route en acceptant l’idée qu’elle ne reverrait jamais la couleur de son bijou. Après tout, c’était en partie de sa faute : si elle n’avait pas laissé ses affaires sans surveillance, le bracelet serait toujours à sa place autour de son poignet. Sous ce constat, d’autres auraient probablement consentit à laisser échapper le voleur impuni. Alors pourquoi s’acharner ? Parce que, pour elle, un larcin, aussi futile qu’il puisse paraître, avait des conséquences et la victime méritait que justice lui soit rendue. Certes, elle avait cruellement manqué de discernement et d’attention, mais cela ne justifiait nullement cette indélicatesse. Au pire des cas, à défaut de retrouver son bien, elle souhaitait au moins savoir en quoi l’objet serait utile à son malfaiteur. Pour cela, elle devait donc le retrouver.

Après qu’elle se soit approchée du buisson aux ombres suspectes, elle avait donc planté le pommeau de sa lance dedans pour voir ce qui en ressortirait. Si elle soupçonnait son ravisseur de bracelet d’être encore dans les parages et de s’être dissimulé dans les broussailles, elle ne s’était, en revanche, pas attendu au canular qu’il lui avait tendu. À peine avait-elle pourfendu les feuillages de son arme qu’une épaisse fumée s’en était violemment dégagée. Une expression de stupeur sur la figure, elle avait eu un sursaut de surprise, avant de rapidement se protéger le visage avec ses bras. Pour peu, la surprise aurait presque pu la faire tomber à la renverse si elle ne s’était pas stabilisée sur ses appuis. Elle aurait été bien incapable de dire si le brigand était encore dans les parages pour observer la scène, mais, si c’était le cas, il devait probablement se délecter du spectacle et se trouver hilare de constater que la soldate était tombé dans le panneau.

Comme rien d’autre ne surgissait, elle avait ouvert les yeux pour constater que la fumée l’entourait. De furtifs regards autour d’elle n’avaient fait que confirmer cette réalité, et elle se trouvait maintenant bien embêtée pour savoir comment s’en libérer. Mais alors qu’elle ne savait où donner de la tête, elle entendait et sentait du mouvement autour d’elle. Était - ce encore une ruse pour la narguer et lui faire perdre l’esprit, ou le malotru profitait - il simplement de sa diversion pour s’enfuir au loin tant qu’il le pouvait ? Peut-être même y voyait-il mieux qu’elle et en profitait pour la dépouiller un peu plus sans qu’elle ne puisse le remarquer ? Elle n’avait, pour le moment, aucun moyen de le savoir.

Elle avait cette terrible sensation de le sentir à la fois proche et lointain, sans réelle possibilité de vérifier que ce n’était pas son imagination qui lui jouait des tours. Pour un temps indéterminé, elle ne pouvait plus compter sur sa vue pour la diriger et devait donc se fier à ses autres sens pour la guider. Mais si son ouïe pouvait l'alerter sur des bruits environnants, elle n’avait aucun moyen d’en connaître l’origine, ce qui rendait l’expérience incertaine, et par conséquent frustrante. Elle aurait trouvé appréciable de trouver un peu d’aide dans le souffle du vent pour dissiper la fumée, mais ce dernier ne semblait pas enclin à lui porter assistance. Elle allait devoir se débrouiller par elle-même.

Pour essayer de reprendre un semblant de contrôle sur les événements, elle avait rapidement réfléchi à un moyen de sortir de ce nuage opaque. Qu’importait la décision qu’elle prendrait, elle était incertaine des obstacles qui se trouvaient autour d’elle. Mais si elle pouvait limiter le risque de se prendre les pieds bêtement dans une racine, ou bien d’entrer en collision avec un arbre, elle en serait ravie ! Il lui restait donc peu de choix : il fallait qu’elle sonde les alentours.

Comme plus tôt avec le buisson, elle avait donc attrapé sa lance. Mais, cette fois-ci, elle allait plutôt s’en servir comme d’une espèce de canne qui lui indiquerait les obstacles sur son chemin. Elle avait donc attrapé l’arme par l’extrémité de la hampe, toujours pommeau en avant pour ne blesser personne, afin que la lance devienne comme une extension de son bras. Puis elle avait effectué un mouvement de rotation pour essayer de détecter un potentiel obstacle autour d’elle. Si jamais elle en venait à toucher quelque chose, ou malencontreusement quelqu’un, cela pourrait agir comme un premier repère pour se diriger. Qui sait sur quoi, ou qui, elle pourrait tomber ?