Come together (Angelo)

Come together

An 1000, Lune 6, Jour 12
Voilà deux lunes qu’Einar se trouvait loin de sa terre natale, ayant suivi les traces d’Angelo jusqu’à Firone pour y commettre plusieurs larcins, dont le plus impressionnant restait la capture de Sena La Douce, ambassadrice des Kokiris auprès de la Reine. Une belle prise qui leur permettait d’asseoir un peu plus leur autorité. Montrer au monde qu’il ne fallait pas les oublier. Retrouver la chaleur des Landes Sauvages était salvateur pour le soldat. Edgar, son Morse des Sables se montrait assez ronchon, probablement agacé d’avoir été ainsi délaissé par son maître. Il le chevaucha jusqu’à la Fosse, suivant le convoi et à dire vrai, il n’avait qu’une hâte : arriver pour se restaurer. Ces jours de voyage avaient été éreintants pour un homme d’action tel que lui. Sa lame n’avait pas assez bu de sang ces dernières heures. De quoi sa colère pouvait se repaître ? De rien, pour l’instant du moins. Celle-ci grondait toujours en son être, prête à l’envahir tout entier. S’il subsistait un tant soit peu d’humanité, cette lueur ne faisait que faiblir au fil du temps jusqu’à disparaître un jour. Il l’espérait.

Les grilles des geôles se fermaient doucement tandis que la Kokiri était emmenée dans sa cellule. Là où elle allait croupir de longues lunes, autant que son Roi l’aura décidé. A partir de ce moment-là, Einar put enfin considérer la mission comme accomplie, désormais qu’elle était entre les mains de ses camarades Yiga, dont son demi-frère Dagon. Sous la bonne garde de ces derniers, la petite ambassadrice n’allait pas leur fausser compagnie. Nul ne sortait de la Fosse vivant. Elle le savait.
Il détailla de ses opales les réactions de Sena La Douce qui oscillait entre appréhension et colère envers ces kidnappeurs. Cela aurait pu l’émouvoir mais il n’avait cure de ce qu’elle pouvait ressentir. Bientôt, tous les peuples d’Hyrule allaient comprendre la supériorité de son Roi. Bientôt, tous seraient assouvis à ses désirs, de gré ou de force. Chaque succès les rapprochait de cet idéal. Puis, son regard se tournait sur Angelo, à l’origine de ce plan savamment bien pensé. La Main du Roi remplissait son rôle à la perfection. Lui était le cerveau et lui le bras armé. Ils formaient un bon duo. De son évolution, il était fier, malgré son apparence chétive, l’habit ne faisait guère le moine. Derrière sa carcasse fragile se cachait un esprit aiguisé sur lequel le Najjar se reposait beaucoup. Un homme de terrain tel que lui ne se perdait pas dans des réflexions interminables, il laissait ce loisir au Zora.

Des larmes coulaient sur les joues de la nouvelle captive, à présent baignée dans l’obscurité. Ce spectacle aurait pu éveiller de la pitié mais rien, ce fut même le contraire qui se produisait, un sourire étirait ses lippes. “Notre Roi sera ravi d’accueillir une nouvelle pensionnaire.” Disait-il d’une voix nonchalante et rauque, autant à l’égard de la Kokiri que la Main du Roi, alors à ses côtés. Ils étaient tout de même éloignés des barreaux, le souvenir du sort réservé à Kaarbjorn tué par l’un de ces prisonniers. Certes enfermée, elle pouvait les atteindre s’ils étaient trop près. Au cas où, le Gerudo n’avait pas hésité à s’avancer pour protéger son Seigneur Main si besoin. Étant donné l’état de détresse de la fillette, elle n’allait rien tenter. Elle savait que cette prison allait être sienne pour très longtemps.

De là, sa carcasse impressionnante se tournait vers Angelo, le sondant rapidement du regard. “Devons-nous le prévenir maintenant ?” Un chuchotement perceptible seulement par eux deux. Il ignorait si Ganondorf était disposé à les recevoir maintenant ou s’ils devaient simplement envoyer quelqu’un le faire pour eux. Einar réclamait un bon repas et espérait que cela puisse attendre. Les décisions de l’Arlaeron étaient les siennes.

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An 1000, Lune 6, Jour 12

Quiconque doté d'une âme et d'un cœur aurait pris pitié de cette pauvre fille. Une malheureuse kokiri, si injustement arraché à ses champs de fleurs et pique-niques quotidiens lors d'un voyage diplomatique urgent. Un imprévu, une malheureuse tragédie qui tomba sur son petit village, obligeant le chef des lieux à envoyer sa porte-parole voir Zelda Nohansen, la reine d'Hyrule.
Pauvre, pauvre petite âme en peine.

Malheureusement pour elle, Angelo n'avait ni âme, ni cœur depuis longtemps.

La Main du Roi avait lui-même orchestré et mené cette expédition. Elle aurait put se dévoiler dangereuse, mais les yigas qui l'accompagnaient étaient des hommes de confiance. Il croyait en leurs capacités et savait qu'ils avaient la force et l'intellect nécessaire pour écouter ses ordres et les exécuter avec précision.
Et comme de fait, les choses s'étaient déroulées sans encombre. Ils avaient leur prisonnière et aucun blessé.

Maintenant derrière les barreaux, incertaine de son sort, chétive et fragile, comme une petite fleur tout justement cueillit menaçant d'être écrabouillée par des mains maladroites, Sena dévisageait tristement tout ce qui l'entourait. Rien ici ne lui rappelait sa patrie. Il n'y avait aucune plante, aucun arbre, aucune verdure pour apaiser son cœur meurtri et effrayé. Angelo la contempla de toute sa hauteur, le regard satisfait. S'il y avait bien une chose qu'il aimait, c'était lorsque ses plans se déroulaient parfaitement. C'était un pas de plus vers leur objectif et en capturant cette femme – crime dont-ils ne se cachaient aucunement – ils imposaient leur présence et leur existence au reste du monde.

Abandonnée dans le noir, Sena pleurnichait, laissant Angelo et l'un de ses précieux acolytes, Einar Najjar, la toiser. Ce dernier commenta que Ganondorf serait ravi d'avoir une nouvelle pensionnaire avant d'interroger Angelo sur la marche à suivre.
« Non. La prisonnière n'ira nulle part et notre roi est occupé. » Il connaissait la routine de Ganondorf par cœur— en soit, une nécessité lorsqu'on occupait ce poste. Angelo jeta un regard froid à Sena, qui n'osait même pas les regarder. Elle tremblotait dans son coin. « Viens donc manger avec moi, Einar. Tu l'as bien mérité. »
Depuis le temps qu'ils se connaissaient, Angelo ne se gênait aucunement de lui parler sur un ton bien plus cordial et léger qu'à d'autres. Ce n'était pas comme s'il prouvait beaucoup de politesse en général – il ne vouvoyait que Ganondorf en réalité – mais avec quelques personnes, dont Einar, c'était bien plus... oserait-on dire 'amical'.

N'ayant guère envie de faire le chemin jusqu'à la Cité Gerudo, le zora, fort confortable dans les hauteurs en raison d'une température bien plus clémente qu'en plein cœur du désert, quitta la Fosse et se dirigea vers les campements yigas. Quelques installations permettaient de manger tranquillement. Il prit place à une petite table entourée de deux chaises, invitant ainsi, sans le dire ou le montrer, Einar à s'installer.
Un simple signe de sa main suffit à pousser un yiga qui préparait quelque chose sur le feu à leur apporter un plateau de viande tout fraîchement préparé. Du vin, du genre un peu épicé et corsé, s'ajouta bientôt à leur table.

S'il ne sourit pas, le regard d'Angelo changea lorsqu'il regarda Einar. Une appréciation certaine.
« Tu as brillé lors de l'expédition. Tu ne m'as pas déçu. » Il attrapa le bock de vin et le porta à ses lèvres suite à ses propos. Ce n'était pas peu dit venant d'Angelo et cela, tout le monde le savait.

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An 1000, Lune 6, Jour 12
Désormais enfermée entre ses murs, Sena allait pouvoir pourrir ici en attendant de savoir ce que le Roi allait faire d’elle. Pour sûr qu’elle risquait d’y rester longtemps, ceux qui étaient enfermés dans la Fosse n’en ressortaient pas. Vivants du moins. Einar était satisfait et considérait la mission accomplie dès lors qu’elle se trouvait derrière les barreaux, dans sa cellule crasseuse. La pauvre petite chose ne verra plus les rayons du soleil avant qu’il ne l’ait décidé. Son destin était entre les mains de Ganondorf, elle n’avait plus que ses yeux pour pleurer et personne pour la réconforter. Sûrement pas ses geôliers. Il savait que Dagon veillera au grain. L’Enragé n’était pas réputé non plus pour sa compassion, mais plutôt pour effrayer les prisonniers aux moindres de ses pas. De quoi briser encore plus la Kokiri. Loin de sa patrie, son âme allait irrémédiablement succomber aux ténèbres. Au-delà du plaisir sadique, c’était surtout celui d’avoir réalisé les plans de la Main sans encombre. Tout avait été parfaitement réalisé. Aucun imprévu n’était à déplorer, leur permettant de mettre la stratégie à exécution.

Angelo avait été le cerveau et Einar l’un des exécuteurs, comme toujours. Ils fonctionnaient ainsi depuis plusieurs années. Le Najjar n’était pas un homme de réflexion mais plutôt d’action, il laissait volontiers l’élaboration de ce plan à la Main du Roi. Et de toute évidence, il ne s’était pas trompé, le Zora était doué. Si au départ, il avait été plutôt prudent, le jugeant trop chétif, il avait démontré d’autres talents, tout aussi utiles. Jusqu’à gagner son profond respect. Au même titre que son Roi, il était prêt à le suivre les yeux fermés, quitte à sacrifier sa vie.

Questionnant sur la marche à suivre, le Gerudo tourna le regard en direction du Zora qui l’invita à se restaurer, ce à quoi il répondit par un hochement de tête entendu. Après un voyage aussi long, c’était tout ce dont il avait besoin. A force de le côtoyer, il commençait à comprendre son fonctionnement. La notion d’amitié était encore vague pour eux mais il savait lire dans son regard, et inversement. Einar n’était pas le plus loquace ni le plus démonstratif mais il se montrait plus détendu à ses côtés. Une marque de confiance.

Deux pas derrière lui, il le suivait jusqu’aux campements Yigas, l’endroit le plus proche et idéal pour se rassasier. Il n’ignorait pas que le Zora souffrait de la chaleur de la Cité Gerudo où Einar évoluait sans peine. Prenant place face à lui, il uma les mets qu’installa un Yiga, de la viande cuite et un bon vin de la région. De quoi mettre ses papilles en éveil. Ses opales claires se posèrent sur le faciès d’Angelo. Les compliments se faisaient rares, il le savait et il le remercia en acquiesçant du chef. “Tu es l’initiateur de cette expédition, je ne suis qu'un exécuteur.” Et il comptait bien lui laisser tous les crédits du succès auprès de Ganondorf. Une teinte de fierté, une voix empreinte de satisfaction. Depuis sa nomination, il avait fait du chemin. En bon petit soldat, il demeurait toujours dans son ombre et cela ne comptait pas changer. Levant son verre désormais rempli, il le fit rencontrer le sien, pour trinquer brièvement, puis il but plusieurs gorgées. “Tu aurais réussi sans moi.” Une vérité qu’il ne disait quasiment jamais, la Main avait gagné sa confiance alors il se permettait de mettre à mal sa propre fierté.

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An 1000, Lune 6, Jour 12

Einar était modeste, mais c'était quelque chose que Angelo appréciait chez son acolyte. Il l'écouta lui dire qu'il était, lui, la tête pensante de cette opération. Sans lui, le plan n'aurait pas pu se passer sans encombre. Il allait de soit que sans la stratégie, l'action n'avait aucun chemin à suivre et tout ne serait que chaos. En revanche, Angelo ne pouvait pas dire être d'accord avec ses propos suivants.

« Une stratégie n'est rien sans soldat pour l'exécuter. » Il n'aimait pas complimenter les autres, même s'il s'agissait de Dagon, Einar ou quiconque autre envers qui il avait plus d'un minimum de respect. Certes, Angelo aurait put exécuter lui-même le plan, mais cela aurait été dangereux. En dépit de son intelligence et sa discrétion légendaire, Angelo n'était absolument pas infaillible. Il était et restait le bras-droit de Ganondorf, sa Main, l'un des éléments centraux de cette organisation. Il ne pouvait pas prendre inutilement des risques, aussi certain soit-il de ses capacités.

Le zora déposa son bock pour s'attaquer à la viande. Le couteau passa comme dans du beurre tant c'était tendre.
« Cette étape effectuée, il faudra songer à plus grande échelle. » Angelo était conscient que leur initiative avait déjà eu des répercussions. « Si ce n'est pas déjà fait, Hyrule aura tôt fait d'entendre parler de l'enlèvement. » Il eut le temps de prendre une bouchée avant de renchérir sur la suite. « Il est temps pour la voix de l'Avatar d'être entendue par delà les Landes Sauvages. L'heure de sortir de l'ombre et d'agir. » Le kidnapping de Sena la Douce n'était, finalement, qu'un élément déclencheur pour que Hyrule prenne conscience de leur existence.

Ils étaient bel et bien vivants, présents.
Et dangereux.

Kaarbjorn avait fait un merveilleux travail pour poser les bases de leur organisation. Son père de cœur n'avait pas chômé. Néanmoins, Angelo avait conscience d'avoir le plus lourd travail sur ses épaules. Aussi frêles semblaient-elles, elles étaient capable de soutenir le poids de ce qu'il avait à faire. Ses responsabilités, son but. L'objectif de l'Avatar était son salut et sa seule direction.

Ses yeux vipérins se tournèrent vers le gerudo.
« Dis-moi Einar. » Entendre Angelo prononcer ces mots annonçait bien souvent une question pouvant mettre n'importe qui dans de beaux draps. Une mauvaise réponse pourrait déplaire à la Main du Roi. En revanche, il s'agissait de son 'ami' ici, les conséquences ne seraient pas les mêmes sinon inexistantes. « Quel serait la prochaine marche à suivre, selon toi ? Quelle est notre prochaine étape ? » Il était réellement intrigué à voir ce qui se tramait entre les deux oreilles de ce soldat. S'il n'était pas le plus stratège du lot, son expérience de vie, de combat, ici, ne pourrait que lui donner quelques éventuelles idées...

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avec @Angelo Arlaeron

An 1000, Lune 6, Jour 12
Einar n’était pas modeste habituellement, il laissait souvent son égo se gonfler en cas de réussite et se briser lors d’échecs cuisants. Cette mission faisait partie d’une réussite, Sena étant désormais derrière les barreaux, à la disposition de son Roi. S’il y avait participé, l’idée venait surtout de la Main du Roi qui s’occupait de la stratégie, lui n’était qu’un soldat, homme d’action. Alors, face à son compliment, Einar ne put retenir un léger sourire, lui qui était avare de démonstrations. Aux côtés d’Angelo, il dérogeait à bien de ses règles. Voilà que l’ours mal-léché s'adoucit. L’Arlaeron était le seul avec Sorcha qui pouvait se targuer de voir l’ombre d’un sourire sur son visage aux traits si durs.

Buvant quelques gorgées de son verre, il le reposa, acquiesçant quant aux ambitions futures du clan. Il avait raison, cet enlèvement risquait d’être remarqué par Hyrule. Enfin la famille royale allait cesser d’ignorer la réalité. D’ignorer la suprématie de l’Avatar. Évidemment, il restait encore tant à faire, notamment faire briller leur dieu au-delà des frontières des Landes Sauvages. Les peuples d’Hyrule devaient ouvrir les yeux quant à leurs dieux tous futiles, tous faibles. Leur existence révélée au monde, il leur fallait continuer sur cette voie. Et pour cela, il ne doutait pas des capacités de la Main dont l’apparence frêle n’était qu’un leurre. Kaarbjorn serait fier de lui s’il était encore en vie et probablement le voyait-il de là où il était. Ses épaules étaient suffisamment fortes pour supporter les responsabilités de sa fonction, les épreuves étaient encore à suivre.

La viande servie était tendre, exquise, ravivant les papilles du Gerudo dont le ventre avait crié famine depuis leur long voyage. Ainsi que son dos à force de chevaucher, mais il ne se plaignait jamais de cela. Ses sacrifices n’étaient que superflus car cela le dépassait, la cause valait bien cela et il était même prêt à donner sa vie. Ses opales claires croisèrent ceux de son interlocuteur dont la question pouvait s’apparenter à un piège. Mais il savait que sa réponse n'engendrait aucune punition. C’était plutôt positif, son avis semblait compter et il s’en sentait honoré. “Comme tu l’as dit, il est grand temps de sortir de l’ombre pour agir.” Un silence de quelques secondes avant de reprendre la parole, d’une voix nonchalante ferme, rauque. “Poster des groupes dans chaque région afin de promouvoir la parole de l’Avatar serait une première étape.” Ainsi, ils pourraient faire office d’ambassadeurs, s’installer durablement dans des zones, mais aussi recruter davantage de fidèles. Du moins en apparence, car la réalité serait tout autre. “Officieusement, ces groupes pourraient déstabiliser le pouvoir en place selon tes exigences.” Des larcins en tout genre, des actions dignes de celles de cette dernière mission. “Quant à la famille royale, nous devons frapper fort, si la Reine est bien protégée, ses conseillers le sont peut-être moins..” Il laissait venir les mots, affichait une mine de réflexion. User de ce Zachery qui croupissait dans leurs geôles. “Envoyer un doigt de ce pauvre bougre en guise de cadeau de mariage pourrait être un bon début ?” Disait-il dans un sourire teinté de sadisme. Ce n'étaient là que des conseils, il se tut quelques secondes avant de conclure, quelque peu amusé. "Je suis meilleur sur le terrain qu'à l'élaboration de stratégie."

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An 1000, Lune 6, Jour 12

Angelo demeurait attentif aux propos d’Einar. Il connaissait la façon d’agir de son interlocuteur et s’attendait déjà à une réponse qui ne correspondrait pas forcément à ses méthodes. Néanmoins, il était toujours intéressé de savoir comment ses favoris se comporteraient selon la situation proposée.

Aussi, mangeant en silence, il écoutait, goûtant ce délicieux vin légèrement épicé des Landes Sauvages et cette viande si tendrement cuite. Un regard extérieur aurait pu le juger désintéressé, et pourtant ! Ce serait mal le connaître. Angelo n’écoutait pas toujours quelqu’un en le regardant dans les yeux ou en interagissant. Il portait oreille, muet, le regard mobile, enregistrant le moindre de ses propos.

Envoyer des troupes pour propager la parole de l’Avatar était une idée classique, mais non pas sotte. Quelques ambassadeurs pourraient faire circuler l’existence de leur bien-aimée Déité, de leur organisation grandissante… Il y avait toutefois des dangers à envisager cette approche. A trop s’éparpiller, ils pourraient subir des trahisons inopinées, voir quelques fidèles maladroits laisser glisser des informations importantes…
Cela comportait trop de risques pour que Angelo l’envisage, mais l’idée n’était pas mauvaise, surtout si on la modelait un peu plus stratégiquement. Par exemple en envoyant une poignée d’élus de grande confiance.

En écoutant le reste, Angelo ramena son regard vers son allié. Il attendit qu’il ait fini.
« Ce sont d’excellentes suggestions si elles sont mises entre les mains de personnes compétentes. » Il parlait bien évidemment de lui-même. Il s’agissait de bases qu’il pourrait modeler à ses aises, éventuellement. « Toutefois tu as raison, Einar. Tu es bien plus efficace sur le terrain. » Ce n’était ni un compliment – quoi qu’un peu – et certainement pas un reproche. Ils avaient tous leur force, celle d’Einar était sur le champ de bataille, tout comme son frère en réalité.

Lassé du repas, il claqua des doigts, poussant un esclave à rapidement attraper leurs assiettes, que le gerudo ait terminé ou non. Un second apporta un plateau de fruits en guise de desserts. Il y avait essentiellement des durians ou des figues de barbarie. La viande était bonne, mais il devait admettre apprécier la délicatesse de quelques fruits pour terminer un repas bien entamé.

« Évitons de mutiler notre prisonnier pour le moment. Il ne faudrait pas encore plus effrayer notre pauvre fleur récemment arrivée. » Il n’en avait cure en réalité. Angelo s’était déjà bien amusé avec Zachary avant l’arrivée de Sena la Douce et il aurait bien put recommencer. Néanmoins, le zora ne faisait jamais rien pour rien et envoyer un doigt coupé à Hyrule témoignerait de l’endroit où se trouvait Zachary. Ils n’avaient aucune garantie qu’il soit un prisonnier des Landes Sauvages… Autant laisser le mystère planer encore quelques lunes.

Un homme arriva aux pas de course et murmura quelque chose dans l’oreille du blond, qui s’immobilisa de suite, attentif. L’individu s’éclipsa aussi rapidement après une brève courbette, laissant Angelo considérer le sol avec réflexion.
« Il semblerait que l’état de notre chamane ne s’améliore pas. » Il pouvait bien le communiquer à Einar, en qui il avait confiance. Il faisait partie des rares sélectionnés qui savaient que leur chamane était souffrante depuis quelques temps. Elle avait contracté une infection, à priori, une infection qui semblait avoir été guérie, mais qui revint à la charge de plus belle quelques jours avant… « Voilà qui s’annonce problématique. » Dit-il d’une voix blanche en allant chercher une figue, ne semblant pourtant pas si perturbé par la nouvelle.

Il y eut un long silence, un silence pouvant être gênant, mais pendant lequel Angelo réfléchissait.
« Einar. » Dit-il sèchement après un moment, de quoi faire sursauter n’importe qui d’inattentif. « Reste alerte pour les jours à venir. Je sens que les choses vont être perturbées d’ici peu… » Angelo était réaliste. Il y avait peu de chance pour que leur chamane s’en sorte, et son décès promettait une cohue sans merci au sein du clan…

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Il n'était pas des plus à l'aise en parlant de stratégie, lui qui était un homme d'action et de combat. Il n'avait pas l'habitude qu'on lui demande son avis sur la question mais cet intérêt de la Main lui faisait plaisir, l'honorait même. Si la question semblait être un piège, Einar le connaissait suffisamment pour savoir que non. Nulle épée n'était à son cou pour le menacer en cas de mauvaise réponse, il le savait pertinemment. Ils avaient développé au fil des années une relation de confiance quasiment absolue. Ce bambin chétif et fragile en avait fait du chemin depuis, il en serait presque émue mais Einar n'était pas démonstratif, le silence parlait pour lui. Quant à ses gestes, ils étaient rares mais Angelo le connaissait suffisamment pour en lire les signes. En déroulant ses arguments, il sentit le regard teinté d'intérêt de son allié, visiblement curieux et réceptif. De quoi le pousser à aller jusqu'au bout de sa pensée, non sans se douter que ce qu'il disait n'était pas forcément utilisable en l'état. Néanmoins, il semblait avoir été d'une certaine aide, cela pouvait être une piste à suivre pour le futur. Ou pas, à dire vrai, il suivrait l'Arlaeron où qu'il aille sans sourciller.

Il hocha la tête d'un air entendu à ses mots, entre de bonnes mains, peut-être que cette stratégie pouvait se moduler et s'adapter. Lui n'avait que songer à la globalité sans creuser mais il était vrai que les risques étaient grands si l'on envoyait des groupes partout en Hyrule. Peut-être faillait-il cibler quelques régions au départ au risque de trop s'éparpiller. Et sans nul doute qu'il ne put qu'acquiescer, la stratégie n'était pas de son ressort, il la réservait aux têtes pensantes comme lui. Il préférait l'action à la réflexion - bien qu'il soit loin d'être stupide. Sur le terrain, il faisait souvent confiance en son intuition qui ne l'avait guère trompé jusque-là. Auquel cas, il ne serait plus de ce monde pour en parler. C'était un point commun non négligeable avec son aîné. Affichant un léger rictus amusé, il n'en rajouta pas moins.

Se reculant légèrement, il posa son dos contre le dossier de la chaise, laissant l'esclave débarrasser la table pour disposer quelques fruits en guise de dessert. Einar ne raffolait guère de ses mets trop subtils à son goût. Mais il se forçait parfois à en manger afin d'avoir tous les apports nécessaires et surtout parce qu'il avait encore faim. Attrapant une pomme, il croqua dans celle-ci avec force tandis qu'il reprenait. "Il ne faudrait pas qu'elle crie trop fort au risque que Dagon ne perde patience." L'Enragé n'était pas réputé patient et encore moins avec les prisonniers bruyants. Bon nombre avaient perdu leur langue à force de hurler ou de parler. Mais Angelo avait raison, laisser planer le doute sur ce prince déchu était une bonne idée, de quoi semer encore plus la confusion au sein de la royauté. Ainsi, ils ne pouvaient clairement pas identifié leurs ennemis. Et de l'ignorance venait souvent la peur.

Soudain, un homme se précipita vers La Main, lui chuchotant quelques mots à la hâte. Il ne put rien entendre mais devina aisément qu'il s'agissait d'une urgence. L'intrus s'éclipsa aussitôt son message rendu, laissant Einar interrogatif. Il écouta attentivement : ses paroles ne faisaient que confirmer son mauvais pressentiment des derniers jours. Cette nouvelle n'était pas réjouissante. Au-delà de sa santé, sa mort risquait de causer la cohue parmi eux, la Chamane, il ne la portait guère dans son coeur, elle se montrait cruelle à son égard lors des rares fois où il l'avait croisé. "Merde." Maugréa-t-il de sa voix rauque. Ce n'était pas de bonne augure effectivement. Levant les yeux pour les ancrer dans ceux du Zora lorsqu'il l'interpella, il se montrait déterminé et attentif, n'ayant nullement sursauté, Angelo avait toute son attention. Comme toujours. Il hocha du chef. "Entendu. Tu as raison, certains risquent d'en profiter. Les opportunistes..." Disait-il d'un ton ferme avec une pointe d'amertume en mordant dans la pomme une nouvelle fois. En trois bouchées, il y était venu à bout, il posa le cadavre du fruit sur la table, détachant sa chemise qui devenait un peu trop serrée à son goût, les boutons jaillirent de tout côté. "Qui est au courant pour l'instant ?" Il ne faudrait pas que cela s'ébruite davantage au risque que la panique ne leur échappe d'ores et déjà.

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An 1000, Lune 6, Jour 12

Angelo esquissa un léger sourire amusé. Il était vrai que Dagon perdrait patience rapidement avec cette petite fleur égarée, perdue au fond de sa cellule, pleurnichant qu’on vienne la sauver… En réalité, l’Arlaeron ne ressentait rien de particulier vis-à-vis de Sena la Douce. Elle n’était qu’un effet secondaire d’un plus grand projet et sa vie ne représentait rien du tout pour le zora. Honnêtement, s’il le pouvait, il l’aurait déjà égorgée, mais voilà qui serait fâcheusement contre-productif.

Ce n’est qu’ensuite, alors que Angelo était en train de déguster quelques raisins, qu’on vint lui annoncer une nouvelle déplorable ; la chamane était toujours aussi souffrante et ne semblait guère aller mieux. Il y avait énormément d’espoirs et d’yeux posés sur la chamane. Elle représentait gros pour la religion du clan Yiga et son éventuel décès promettait de laisser des effets… indésirables sur la mentalité des esclaves, mais aussi de leurs collègues. Angelo ne pouvait laisser cela se produire.

Ses yeux passèrent distraitement sur la peau découverte d’Einar, au niveau du torse, puis son regard se dirigea sur le faciès du guerrier, juste alors qu’il portait un raisin à ses lèvres, sans pour autant le faire passer la barrière de ses lippes. Il laissa la peau du fruit caresser sa bouche le temps de sa tirade.
« Toi, moi. Cet esclave. » Angelo plissa légèrement les yeux, avant de jeter un regard oblique sur le côté. « Il faudra se débarrasser de lui. Qui sait à qui d’autre il ira parler. » Il préférait rester prudent, sait-on jamais ! Angelo ne pouvait se risquer à laisser une information aussi importante s’ébruiter… « Dagon est occupé à autre chose, je préfère éviter de l’enquiquiner avec cela pour le moment. »
De l’index, il poussa le raisin outre ses lèvres et dégusta le fruit, avant de se lever, signalant la terminaison de ce repas. Debout, il termina cul-sec ce qu’il restait de vin dans son verre et posa le bock sur la table.

« J’aimerais constater par moi-même de la situation. » Le Seigneur-Main repoussa élégamment ses cheveux blonds en arrière, fit quelques pas, puis se tourna vers Einar, l’observant avec intensité. « Accompagne-moi. J’aurai à faire avec toi ensuite. » Sans l’ombre d’un mot supplémentaire, Angelo prit les devants, invitant le yiga à prendre sa suite.
Ils prirent la direction des quartiers où la chamane était en repos. Il y avait quelques personnes en extérieur, des gardes surveillant les alentours, mais également des esclaves, des femmes, qui nettoyaient et s’assuraient de la maintenance des lieux. Encore des gens dont il devrait se méfier.

Il fit un geste de la main, et les gardes s’éloignèrent d’un pas si vif que c’était à croire qu’ils le craignaient.
Oh, mais c’était le cas.

« J’ai confiance en toi, Einar. » Il attendit un signe de son "ami" avant d’entrer dans la pièce où la chamane, fortement souffrante, était endormie, luttant en silence contre une infection des plus dévorantes.

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An 1000, Lune 6, Jour 12
Voilà que cette mauvaise nouvelle venait interrompre leur repas, de quoi mettre le guerrier de mauvaise humeur. Il ne tenait pas la Chamane dans son coeur, celle-ci étant d'une cruauté irrationnelle à son égard, mais il n'ignorait pas son influence au sein du clan. Elle était en lien direct avec l'Avatar, savait écouter ses signes les interpréter. Elle était essentielle, pour sûr que son trépas risquait de semer la zizanie au sein de l'organisation. S'ils avaient festoyé pour la mission réussie à Firone, la joie risquait de vite laisser place à la panique. La mine renfrognée, le Gerudo avait défait quelques boutons de sa chemise qui volèrent dans la pièce, ce n'était pas la première ni la dernière fois. Il avait chaud - à cause de la colère mais aussi de ce dîner copieux qu'il venait d'achever. Ses opales ne quittaient pas La Main qui dégustait les derniers fruits, des raisins amenés à sa bouche, cela pourrait presque éveiller une drôle de sensation chez le guerrier - qu'il balaya bien vite.

Son regard se plissa, suivant celui d'Angelo sur cet esclave qu'il faudra éliminer par la suite. Einar hochait la tête, d'un air entendu. La prudence était toujours la meilleure des alliés en ces temps troublés où les personnes de confiance se faisaient rare. Il s'en occuperait personnellement, comme toujours. Sa lame n'avait que trop peu goûté au sang ces derniers jours. De quoi épancher sa soif. Tandis qu'il buvait cul sec son verre de vin, il se leva aussi d'un geste brusque, il reposa le verre sur la table de bois qui en trembla. Il était légitime que le Zora souhaite s'enquérir de la situation par lui-même, il fallait songer d'abord faire un état des lieux avant de songer à la suite. Ses opales dorées fixaient celles du jeune homme. "Très bien, allons-y." Disait-il sans plus de cérémonie. Le grand gaillard glissa son épée dans son dos, prêt à toute éventualité alors qu'il prenait la suite de l'Arlaeron. Sur leur chemin, ils croisèrent des esclaves aux regards tantôt hagards tantôt interrogatifs ou même suspicieux. Les sens du Gerudo étaient en alerte, telle une bête sauvage, il analysait tout, les moindres réactions, pour protéger le "gamin". Enfin, La Main était craint parmi eux et nul ne tenta quoi que ce soit, mais dans un coin de sa tête, Einar avait soigneusement retenu certains visages aux regards défiants. Ils risquaient de perdre leurs têtes dans les prochaines heures.

Les gardes devant la porte de la pièce où se trouvait la Chamane souffrante se décalèrent rapidement, comme apeurés - à juste titre. Tournant la tête vers Angelo, il échangea un regard entendu avant d'entrer le premier, sa main posée sur le fourreau de son épée afin de la dégainer le plus vite possible. A pas feutrés, il découvrit la sorcière allongée, dans un état végétatif. Sa peau brillait de sueur et son visage était crispé, elle luttait contre l'infection. Avisant la salle, il fit signe à La Main d'entrer, aucune menace n'avait été identifiée, pour l'instant. Désormais seuls, ils pouvaient observer les ravages causés par cette maladie sur elle. Amaigrie, le teint pâle, elle semblait vivre ses dernières heures. Son instinct lui criait qu'elle était effectivement sur son lit de mort. Doucement, il glissa ses doigts sur le cou de celle-ci pour y déceler son pouls. Les battements étaient presque inexistants. "Son coeur ne bat presque plus, elle est en train de mourir." Disait-il avec un certain abattement, à voix basse, tandis qu'il se reculait pour regarder Angelo. S'ils n'abrégeaient pas ses souffrances, la maladie le fera. Alors, silencieusement, il demandait quoi faire.

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An 1000, Lune 6, Jour 12

La situation était on ne peut plus complexe. Si ce que l’esclave avait rapporté était exact, alors la chamane était aux portes de la mort. Elle ne tarderait pas à rendre l’âme et son dernier souffle, sitôt poussé, promettait de propager une tempête de doutes au sein du clan. La chamane était celle qui portait la croix de l’Avatar, celle qui transmettait Ses messages et qui parlait en Son nom. Son décès risquait d’ébranler les croyances des plus faibles et de perturber les plus forts.
Pourtant, ils ne pourraient pas l’empêcher.

Angelo le comprit en pénétrant dans la pièce.

Ses yeux se posèrent sur une femme faible, endormie pour ne pas dire inconsciente, berçant en elle une souffrance muette. Elle luttait contre l’infection qui avait prit possession de son être dès l’instant où elle apporta ces trois cadeaux de l’Avatar en ce monde. L’événement était arrivé trop brusquement ; ils n’avaient pu se préparer adéquatement pour la naissance. Le résultat était là ; en échange de ces trois poupons, ils perdaient leur chamane.

Einar prit connaissance de l’état de la sorcière. Angelo plissa les yeux.
« Sa mort promet de provoquer un vent de panique au sein du clan. » Affirma-t-il avec certitude, discrètement, au cas où des oreilles indiscrètes se situeraient à proximité de la porte. « C’est malheureusement inévitable. Elle mourra dans les prochaines heures. » Il y avait bien une chose qui tenait à cœur au zora ; que l’organisation reste calme. S’ils s’affolaient, le résultat pourrait être désastreux. « Si la nouvelle se propage, la foi de notre clan sera ébranlée. » Sa main gauche, dont les doigts étaient couverts de ses griffes métalliques, effleura une mèche humide de la sorcière, dévoilant son visage creusé par la maladie.

« Je ne suis pas sot, Einar. Nous ne pourrons garder cela secret. » Grave, Angelo paraissait réfléchir, calculer, tout poser dans son esprit pour envisager la meilleure solution. « Mais tâchons de le faire aussi longtemps que possible. » Le regard serpentin du zora se leva vers une ouverture au loin qui menait vers les quartiers des deux servantes personnelles de Tenebrae.
Il savait ce qu’il avait à faire. « Que personne ne s’approche de cette pièce jusqu’à ce que sa flamme soit éteinte. Quant à ceux qui sont au courant de son état, je les veux morts avant demain matin. » Cela ne représentait pas beaucoup de gens. Dagon s’était déjà occupé du messager, il ne restait que l’esclave qui était venu voir Angelo à table, plus tôt, et…

Le zora se positionna à côté du gerudo, sa main aux griffes métalliques attrapant la sienne pour la soulever. Il en admira la force, la forme, puis plongea son regard dans celui d’Einar.
« Je te laisse une mission particulière, cher ami. Vois à ce que ses servantes soient également… » Il lâcha sa main en laissant ses griffes passer sur sa peau, sans le blesser. « …réduites au silence. »

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L'Avatar en avait décidé ainsi. De prendre la vie de cette pauvre malheureuse dont l'heure était arrivée. Einar n'y pouvait rien tout comme La Main. Personne n'allait à l'encontre des desseins de leur divinité. Posant ses doigts sur son cou, il ne sentit qu'un pouls faiblard, semblable à celui d'un damné. Sa vie ne tenait qu'à un fil mais l'échéance arriverait tôt ou tard désormais. Celle qui avait donné naissance à trois enfants allait succomber, rappelant à tous le prix que cela avait coûté. Au-delà de l'aspect émotionnel dont le guerrier se fichait éperdument, c'était surtout l'équilibre des Yiga qui se voyait menacé désormais. La foi de certains risquait de se voir ébranler suite à une telle nouvelle. Angelo ne fit que le confirmer.

Le chaos allait advenir. Auréolés de gloire suite à leur succès à Firone, l'organisation allait devoir tenir bon. Leurs têtes pensantes se devaient de ne pas céder à la panique, garder leur sang-froid. Le Najjar savait que sa lame risquait de goûter aux sangs de traitres potentiels. Des défections allaient survenir, c'était évident. Il s'assurerait avec son frère, que leurs têtes soient au bout d'une pique. Mais l'heure n'était pas à la répression sanglante. Pour l'heure, peu d'entre eux étaient au courant de l'état critique de la chamane. A défaut de garder le secret éternellement, il pouvait au moins retarder le processus. D'une oreille avisée, le Gerudo écoutait attentivement le Zora. Il buvait ses paroles, même, ayant parfaitement compris ce qu'il attendait de lui désormais. Une marque de confiance qui l'honorait. "Nous ferons le nécessaire." Tuer ceux qui étaient au courant, à débuter par ce messager dont l'Enragé avait pris la responsabilité. Les autres, Einar s'en occuperait personnellement. Ils n'étaient qu'une petite poignée pour l'heure. Son regard doré se dirigeait alors vers l'ouverture menant aux servantes de Tenebrae. Deux cibles clairement identifiées.

Délicatement, le Zora attrapait son imposante main, tout aussi massive que son corps tout entier. Son regard fut irrémédiablement capté par le sien, s'y perdant un instant, le guerrier, à ce contact ressentit une étrange sensation. Un frisson l'étreignit lorsqu'il sentit ses ongles frôler son échine, le genre de frisson nullement causé par la peur...Une sensation comme nulle autre et dont il ne parvenait pas à comprendre. Ses sourcils se froncèrent légèrement tandis qu'il hochait la tête, avec gravité. "Bien. Une fois que c'est fait, je viendrais te faire mon rapport." Ce qui ne devrait pas tarder étant donner l'urgence de la situation. Echangeant un dernier regard entendu, il s'engouffra dans le couloir sombre et tortueux, semblable au sort qui attendait ces pauvres femmes. Sans une once de pitié, il ferait ce pourquoi il était là. Abattre son épée, faire couler le sang.

[...] Quelques heures s'étaient écoulées, la nuit était déjà avancée. Ses méfaits accomplis, Einar ordonna à ce que l'on sécurise l'entrée et que personne n'approche de la pièce où se trouvait la chamane. Les corps des deux servantes avaient été brûlés, comme si elles n'avaient jamais existé. Quant à l'esclave venu plus tôt, celui-ci n'avait pu échapper à son destin. D'un pas décidé, le voilà qui arriva aux appartements de la Main après avoir été autorisé, évidemment. "Tout a été fait selon tes désirs. Si les servantes n'ont pas résisté, l'esclave s'est montré un peu moins coopératif, mais la finalité reste la même.." Annonça-t-il à voix basse une fois, se tenant droit tel un i, ses vêtements tachés du sang de ses victimes. La peau de son avant-bras entaillée en était la preuve. Peu importait la fatigue, il ne montrait rien.

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An 1000, Lune 6, Jour 12

Angelo savait qu’il pouvait compter sur Einar pour faire les sales besognes – comme sur son frère, d’ailleurs. Ils étaient tous les deux ses chiens de chasse. Ce serait mentir que de ne pas souligner que le zora aimait cette sensation. L’idée d’avoir ces deux bêtes sauvages à son service non seulement pour se salir les mains à sa place, mais aussi pour le protéger, non pas qu’il estime en avoir besoin, mais… sait-on jamais, dans ce monde. Seigneur-Main peut-être, respecté sans doute, mais un yiga perdu, trop téméraire, pourrait bien tenter de lui trancher la gorge dans son sommeil.
Mais pas sous la surveillance des Najjar. Oh, cela jamais.

Sa troisième hyène s’avérait être un peu plus humaine que ces deux guerriers. Sorcha était également une alliée précieuse. Plus discrète, elle représentait un atout plus singulier dans son arsenal. Pas de jaloux ; Angelo les considérait les trois comme ses alliés prioritaires. Ils formaient un trio, ne leur en déplaise avec leurs querelles fraternelles et l’éventuel dédain que la femme pourrait avoir pour ces grands hommes. Grâce à eux, il s’estimait… chanceux, oserait-on dire.

Chanceux, déjà ici, de voir un Einar serviable qui déclara qu’il ferait le nécessaire. Angelo esquissa un sourire et hocha du chef. Il le regarda disparaître dans le sombre couloir, avant de lui-même s’esquiver pour retourner à ses propres appartements. Il aurait pu aller à la rencontre de Ganondorf pour lui déclarer l’état préoccupant de la chamane, mais il n’en voyait pas l’intérêt. Il connaissait déjà son état. Au pire des cas, elle mourrait demain, et Angelo irait le voir à ce moment-là.

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Le zora eu le temps de procéder à une toilette et de manger avant que Einar ne reparaisse. Lorsqu’il apparu dans ses appartements, les vêtements couverts de sang et le bras blessé, Angelo le considéra avec une note de fierté dans le regard. Le gerudo exprima que la tâche avait été accompli. Le Seigneur-Main attrapa les pans du kimono rose et bleu qu’il portait ; tenue de nuit légère pour les nuitées désertiques, il appréciait la fraîcheur nocturne, sa nature de zora sans l’ombre d’un doute ; pour le serrer sur l’avant, croisant les bras en adressant un regard satisfait à Einar.

« Tu as belle allure. » Il n’y avait qu’avec les Najjar ou Sorcha qu’il se permettait d’être ainsi présenté ; il n’avait aucune arme sur lui, pas même ses griffes, ce qui l’empêchait d’utiliser la foudre sans risquer de grièvement se blesser. Tirant ses cheveux en arrière, le zora se dirigea vers une petite table sur laquelle une cruche remplie de vin épicé se trouvait. Il servit deux verres et en tendit un à son compagnon. « Bois. Tu l’as mérité. » Il avait bien le droit de se détendre après toutes ces heures…

D’ailleurs.
« Combien de temps as-tu poursuivi ce cloporte Einar ? Tu as mis plusieurs heures. » Il semblait se moquer, détail bien rare de sa part. Il sirota un peu le vin, observant de bas en haut ce brave ami. Il ne constata qu’à cet instant la vilaine blessure à son bras. Le zora s’approcha, déposant son verre sur la table au passage, et de ses mains délicates, attrapa le poignet du gerudo pour observer la plaie. « Il s’est fort bien défendu, en effet. J’espère que tu lui as fait payer cet affront. » Qu’il ait souffert avant de mourir. Son doigt effleura la commissure de la blessure, sans vouloir faire mal mais sans s’inquiéter si c’était le cas. Il connaissait Einar ; il ne montrerait rien.

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Tout comme son aîné, Einar était capable de suivre Angelo jusqu'en Enfer tant il lui était dévoué ainsi qu'à l'Avatar. Sa loyauté était sans borgne, il l'avait d'ailleurs prouvé depuis plusieurs années. Le Gerudo estimait sincèrement le Zora - qui pourtant, au départ, ne payait pas de mine. Chétif, frêle, le gamin l'avait emporté et n'avait pas démérité, obtenant un poste prestigieux, si ce n'était le plus important de toute l'organisation. La Main de leur Roi, celui qui était le plus proche de Ganondorf et se devait de s'assurer de la bonne organisation du clan. De lourdes responsabilités l'incombaient alors. Force était de constater que cela ne l'empêcha pas de briller, de montrer qu'il était le digne héritier de l'ancienne Main. Le Najjar ne doutait aucunement de ses capacités, amplement démontrées depuis sa nomination. Il était à présent respecté et craint par tous, mais les Najjar et Sorcha veillaient au grain. Toujours.

Or donc, le gerudo aux cheveux argentés s'éclipsa pour semer la mort là où Angelo l'avait souhaité. Fidèle bras armé, il faisait couler le sang en son nom et celui de leur sombre divinité. Malheureusement pour lui, l'esclave s'était débattu comme un beau diable avant que sa lame ne s'abatte sur son cou. Légèrement blessé par la lutte, il n'avait cependant émis aucune plainte. Leurs corps étaient brûlés, comme s'ils n'avaient jamais existé. Si cela pouvait éviter à cette terrible nouvelle de se disperser dans les rangs, alors soit. Einar n'avait rien ressenti en prenant leurs vies - anesthésié, il en prenait même un certain plaisir. La sensation de pouvoir, un profond sadisme ? Un peu des deux certainement.

Peu présentable, il gagnait les appartements du Seigneur-Main afin de faire son rapport une fois ses méfaits accomplis. Dans l'intimité de ses quartiers, il entrevoyait Angelo dans une tenue plus légère. Peu d'entre eux avait cette chance de l'approcher de si près sans ses armes habituelles. Une vulnérabilité inédite mais à laquelle le Najjar était accoutumé, ce n'était pas la première fois qu'il agissait dans l'ombre pour lui. Et il n'hésiterait pas à le faire encore et encore. S'apprêtant à boire, il s'immobilisa à sa question dite sur un ton moqueur. Une lueur amusée s'éveilla des yeux du Gerudo. "Il a mis du temps à se vider de son sang." Et un sourire sadique illumina son visage en repensant à cette scène où il lui avait coupé ses attributs masculins et l'avait regardé agoniser. Le doigt effleurant sa peau à vif éveilla un frisson mais non pas de douleur, au contraire. Et durant une seconde, il trembla, souffla un peu trop bruyamment aussi. Une proximité qui le rendait presque fébrile, lui le grand gaillard de presque deux mètres. "Sa mort fut à son image : pitoyable. S'il était un homme, je n'ai pas voulu qu'il meurt comme tel." Disait-il avec lenteur, ses opales s'ancraient dans celles de son commanditaire. Que se passait-il présentement ? Pourquoi il fixait autant ses lèvres ? Pourquoi celles-ci paraissaient si délicieuses, si tentatrices ? Etait-ce la fatigue qui parlait ? "As-tu besoin de moi pour...autre chose ?" Il n'avait pas bougé d'un centimètre, continuant de le fixer un peu trop.

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Il avait mis du temps à se vider de son sang ? Angelo parut réfléchir, mais n’eut aucune réaction particulière, la preuve étant qu’il était satisfait de la réponse. Il s’interrogea surtout sur la profondeur de la blessure que le guerrier avait sur le bras ; une vilaine marque qui venait sillonner sa musculature comme sa peau. Il ne démontrait rien, mais cela n’était pas étonnant venant d’Einar.
Sa réponse laissa un éclat dans le regard du zora. En effet, les propos d’Einar concernant la mort de ce cloporte eut de quoi le ravir. Il lâcha doucement son bras, le libérant ainsi de sa présence sans pour autant reculer. Car après tout, n’avait-il pas dit qu’il aurait besoin de lui ensuite ?

Tout près, si près, Einar le lui demanda : avait-il besoin de lui pour autre chose ? La manière dont il posa la question amusa Angelo. A croire qu’il n’osait pas, comme si c’était la première fois que cette grande brute s’immiscerait dans ses quartiers à des fins autre que le meurtre ou la torture. Angelo savait très bien ce qu’il souhaitait, néanmoins… Si près de ses lèvres qu’il ne toucha pas, il se contenta de quelques mots.
« Aussi seyant soit-il sur ta personne, Einar, ce parfum de sang et de sueur ne m’attire guère. » Le Seigneur-Main se recula sans quitter le guerrier gerudo des yeux. Il avait belle allure pourtant, il aimait ce côté… bestial, oserait-on dire, mais il n’aimait pas l’odeur qui venait avec. Angelo était un individu particulièrement propre et tatillon lorsqu’il s’agissait de la propreté. Ce n’était pas nouveau, ni secret. Aussi, il tendit la main pour démontrer un paravent, un peu plus loin.

« Fais-moi le plaisir de te baigner, avant toute chose. » Il avait fait exprès de préparer un bain encore bien chaud pour l’arrivée d’Einar. Il savait qu’il le retrouverait recouvert de ce parfum de mort. L’odeur métallique du sang, qui prenait la gorge, qui lui rappelait l’excitation du meurtre. Il aimait le sentiment, pas l’arôme. « Défais-toi de tout ceci. Tu n’en auras pas besoin. » D’un geste las de la main, il démontrait clairement les vêtements que portaient son acolyte.

L’ordre donné, Angelo revint chercher son verre de vin épicé et entreprit de le siroter, le temps que Einar s’exécute. Il s’installa sur le bord de son lit, une grande couche particulièrement confortable aux multiples coussins dans les tons bleus et ors, et contempla le grand homme qui s’apprêtait à se dévêtir pour le plaisir de ses yeux. D’ici, il pouvait voir la grande bassine servant de baignoire, prête à accueillir le gerudo. Il n’avait pas à bouger ; le spectacle s’offrirait à lui.

« Panse ta blessure également. » Dit-il en voyant le reflet de la plaie à la lumière lunaire. Il ne voulait quand même pas que l’un de ses meilleurs éléments se retrouve infecté par une blessure mal soignée, surtout après ce qu’ils venaient de voir. Une infection en plein désert lui retirerait rapidement la vie, et il était hors de question que cela n’arrive. Pas à l’une de ses précieuses hyènes.

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Einar était une brute, il ne connaissait rien de la douceur, rien de l'amour. Les sentiments n'étaient que futiles à ses yeux, ils rendaient faibles. Depuis toujours, le Gerudo vivait dans la violence, ne laissant que peu de place à ce genre de démonstration. Pas même la douleur de sa blessure qui se refermait peu à peu grâce à sa régénération, celle-ci n'était d'ailleurs pas sans conséquences. Il ressentait une certaine fatigue l'envahir, sa tête tournait quelque peu. Ou était ce la proximité entre eux ? De sentir son parfum qui lui faisait perdre la tête ? Faisant accélérer son palpitant, jusqu'à l'engourdir. Voilà que le colosse ressentait autre chose que de la haine ou de l'aversion. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'il venait ici pour autre chose que des meurtres... Effleurant ses lèvres, le Seigneur-main s'écarta, Einar, non content de cela reteint un grognement. Sa remarque ne l'étonna guère, Angelo était toujours attentif à son apparence, à ce qu'elle soit irréprochable. Tout son contraire. L'Arlaeron était subtilement beau, grâcieux quand le Najjar faisait davantage office de bête sauvage - bien moins que son aîné cependant.

Un rictus amusé étira ses lippes alors qu'il lui ordonnait de se laver de toute cette saleté. Il apercevait le bain déjà fumant. "Je vois que tu avais anticipé ce détail." Comme toujours d'ailleurs. Un mélange de sang, de transpiration et de mort avait tâché sa chemise sombre. Lui n'en sentait plus l'odeur à force d'être baigné dedans. Il s'y était accoutumé. L'homme s'exécuta sans attendre, retirant son épée nichée dans son dos ainsi que la dague à sa ceinture. Lentement, il retirait chaque vêtement à l'état déplorable. Résultat de longues heures de labeur et de lutte.

Désormais nu, il ne fut nullement dérangé par cela, à dire vrai, il appréciait plutôt être admiré par Angelo. Son corps aux muscles saillants se montrait sans une once de pudeur. Il n'avait rien de parfait ou de gracile, quelques cicatrices le parsemaient, toutes avaient une histoire. L'eau chaude le fit frémir, mais doucement, il entrait dans la baignoire. Après tant d'effort, la chaleur du bain apaisait ses muscles endoloris. Un soupir de bien-être traversa la barrière de ses lèvres. "Par l'Avatar, ça fait si longtemps que j'en avais oublié les bienfaits." Il était détendu et ferma les yeux afin d'user de son don. Peu à peu, sa coupure cessa de saigner, se refermant suffisamment pour ne plus être problématique. Cette utilisation lui donna une vilaine migraine, il se massa les tempes afin que celle-ci ne soit plus qu'un mauvais souvenir. Rouvrant les paupières, il les posait sur Angelo qui n'avait rien loupé. "Penses tu que ce que nous faisons suffira ou ça permet simplement de gagner du temps ?" Le Gerudo se sentait à l'aise, et donc, légèrement plus bavard qu'à l'accoutumée. Ici, dans l'intimité de ses appartements, il ne craignait rien. La bête qu'il était baissait sa garde ici, comme rarement. Serait-ce le lieu ou la personne qui l'accompagnait ? Les deux, assurément.

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Assis sur le bord de son lit, Angelo avait une vue impeccable sur la musculature saillante d’Einar, tandis qu’il anticipait les mouvements pour rejoindre la baignoire dont l’eau encore chaude saurait mordre à la saleté qui couvrait sa peau abimée. C’était connu qu’Angelo jugeait insupportable les mauvaises odeurs, la malpropreté, le sang. Pourtant, il n’était pas le moins sadique du lot. Faire saigner les autres le faisait frissonner, mais se retrouver lui-même souillé par le sang d’autrui ? Diantre, jamais.

Le zora se leva d’un mouvement muet, telle une ombre se mouvant dans le décor, pour attraper un verre tout près et le remplir de vin à nouveau. Sirotant le précieux liquide, il s’approcha discrètement de la baignoire, juste alors qu’Einar avait fait usage de son pouvoir pour panser ses blessures. Il connaissait les effets néfastes de l’utilisation de celui-ci et devina, au visage du guerrier, qu’une migraine promettait de pointe le bout de son nez.
Il s’installa tout près, sur le bord de la baignoire en réalité, et observa Einar qui lui demanda si ce qu’ils entreprenaient suffirait à étouffer la mort de la chamane… ou si cela ne leur permettait uniquement que de gagner du temps.

En réalité, Angelo ne savait quoi répondre. Il était logique, et réaliste. D’un mouvement sec, le Seigneur-Main termina sa coupe de vin et la lança négligemment sur le sol dans un tintement déplaisant qui le fit grimacer légèrement.
« Cher Einar, tu poses des questions sottes. » Déclara-t-il d’une voix lasse. « La mort de la chamane finira par être remarquée, voire annoncée. J’ignore comment notre roi bien-aimé entend gérer la situation. J’en parlerai avec lui. » Ils ne pourraient pas éternellement cacher l’absence de cette femme ni la justifier. Elle serait morte ; cela était une réalité qui se ferait savoir un jour ou l’autre, qu’ils le veuillent ou non. Ainsi, de cette façon, Angelo répondait indirectement au guerrier : ils gagnaient du temps.

Il tendit la main, une griffe décorant son index. Il l’avait remise en chemin. De l’extrémité de celle-ci, il circulait sur le torse du gerudo, menaçant de le blesser à tout moment s’il faisait un faux mouvement. Sa précision était exemplaire tandis qu’il sillonnait les muscles de l’homme comme si ce n’était qu’un jeu et qu’à tout instant, il pourrait soudainement le poignarder.
« Quoi qu’il en soit, nous ferons le nécessaire. » D’un mouvement sec de la main, Angelo ramena ses doigts vers lui, entaillant la poitrine d’Einar juste au-dessus des pectoraux. « Hm. » Se contenta-t-il de faire, un sourire à peine visible sur le visage. Il admira un instant sa griffe, où une petite teinte rougeoyante brillait sur le bout, avec un éclat de malice dans le regard.

« Toujours aussi tranchante… » Il savait Einar à sa merci. Il ne pouvait pas faire grand-chose dans cette position, et encore moins repousser quoi qu’il entreprenne, sans quoi cela pourrait être jugé comme une insulte ou un profond manque de respect. Aussi, Angelo se plut à ramener ce même doigt près de la blessure d’où tombait quelques gouttelettes de sang, et laissa la pointe suivre le galbe de son abdomen, jusqu’à s’immobiliser quasi dans l’eau. « La vulnérabilité ne te sied guère. Et pourtant, te voilà à ma merci. N'as-tu pas honte ? » C’était une véritable interrogation. Ne se sentait-il pas embarrassé, lui, grand guerrier doté d’une fierté démesurée, de se trouver dans cette position ? Nu, immergé, avec une griffe plus tranchante que sa lame pointée au-dessus de son nombril, pouvant l’empaler n’importe quand ?
Si près du danger, si près de la blessure, sans franchir le pas. Un frisson le traversa rien qu’à y penser.

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Être souillé par le sang et la transpiration n'effrayait aucunement le guerrier dont l'apparence n'importait pas, contrairement à Angelo. Délicat, apprêté, le Zora redoublait d'efforts pour demeurer impeccable. Il fallait dire que cela rendait justice à cette beauté subtile qu'il arborait, loin de la bestialité du Gerudo. Au vu de son rôle de hyène, il était plutôt logique ce soit lui qui se salisse les mains, tuant ceux qui pourraient nuire à ses intérêts. Einar n'était donc pas là pour paraître mais pour agir, dans l'ombre - probablement pas autant qu'Eluna, sa lame s'abattant sur les pauvres malheureux qu'ils avaient identifié.

Dans cette eau chaude, il ferma un instant les yeux, sentant ses muscles se détendre, pour une fois d'ailleurs. Sa blessure se refermait doucement mais sûrement, non sans un certain sacrifice. En dehors des appartements de la Main de son Seigneur, l'homme restait sur ses gardes constamment, prêt à bondir sur l'esclave osant le regarder de travers, dans cette baignoire, il n'était plus ce Gerudo inaccessible ou invincible. Rouvrant les paupières, il les posa sur le Zora, assit à ses côtés. Ce qu'ils faisaient présentement, permettait seulement de gagner du temps, sa question demeurait rhétorique, il s'en rendait compte à présent. Ses opales dorées scrutèrent le verre qui chuta au sol. Question sotte, en effet, il ne lui donnerait pas tort, acquiesçant silencieusement, il avait totalement confiance en son Roi et l'Arlaeron pour faire au mieux. Lui n'était qu'un exécutant et cela lui convenait parfaitement. La réflexion ou la stratégie, très peu pour lui. C'était dans la violence, le sang et les cris qu'il se sentait pleinement vivant. Mais pas que finalement, car présentement, son palpitant s'emballait tandis que la griffe parsemait son torse. Retenant l'emballement de sa respiration en choeur avec son coeur battant, il levait le regard vers le Zora. "Comme toujours." Disait-il laconiquement, ils faisaient le nécessaire ensemble. Le trio de hyènes infernales à la disposition de leur maître.

Dans cette position de dominé, le Gerudo s'étonnait à y prendre un certain plaisir, lui qui souvent asservissait autrui. A présent que les rôles s'inversaient, le gaillard sentait l'adrénaline le parcourir : non pas qu'il avait peur mais être si proche du danger, si proche du précipice était profondément jouissif. Il se trouvait là à la merci d'Angelo, emprisonné de ses désirs, et pourtant, un sourire étira ses lippes, une nouvelle fois. S'il avait honte ? Aucunement. Après tout ici, ils n'étaient qu'eux deux, loin des curieux. Sa fierté mise de côté, il se surprenait à apprécier l'instant. "Je me soumettrais à toi éternellement s'il le faut Angelo." Lui et son Roi étaient les deux capables d'une telle influence sur sa personne, et aussi leur déité. S'il devait succomber, alors ce n'était pas pour rien mais par la volonté de l'Avatar. A ses mots, sa voix était plus gutturale, trahissant le désir qui l'animait, à l'image de la nuit qui les attendait. Loin de la tendresse ou de la douceur mais plutôt une bestialité certaine. Un désir brut et sans fioriture, un désir à leur manière : un langage commun.

FIN.

(c) DΛNDELION

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blood is burning

I've been on my own for long enough, Maybe you can show me how to love, maybe. I'm going through withdrawals. You don't even have to do too much

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