[PERSONNELLE] (***) avec Midona Vajanska et Aleksander Hesediel - Sois plus ardent que le feu des volcans

La rousse fut surprise par la violence du choc contre le mur lorsque son attaque montra une puissance toute nouvelle. La pièce trembla un instant, le choc de sa magie soulevant de la poussière dans un même mouvement. Elle eut un léger sourire en coin, satisfaite d’arriver enfin à faire ce qu’elle voulait, satisfaite de pouvoir enfin montrer à son instructeur qu’elle n’était pas Reine pour rien et que ses enseignements étaient bien là. Puissante, elle espérait l’être assez pour continuer à porter sur ses épaules ses devoirs royaux. En raison des derniers évènements, elle aurait besoin d’être forte ou, au moins, de se montrer tel quel. Et surtout, lorsque Xanto fera de nouveau surface, elle pourra lui faire face. Pleinement.

Les paupières de la rousse s’ouvrirent et ses prunelles s’attardèrent sur le mur du fond qui avait accueilli son attaque, puis sur son instructeur. Aleksander commenta son attaque d’une voix paraissant presque banale. Pour autant, la rousse pu sentir la satisfaction dans les paroles de l’Hesediel, et apercevoir son propre sourire en coin. Il était ravi par la démonstration de magie de la jeune femme. L’effet escompté était là et elle arrivait enfin à se diriger dans le sens qu’il voulait qu’elle prenne. Midona n’était pas certaine que sa colère puisse s’allier aussi bien à sa magie mais elle était bien obligée de se rendre à l’évidence. Mêler les émotions à sa magie d’ombre, lui donnait une toute nouvelle portée. Elle n'allait pas s’en plaindre. Voilà au moins l’utilité qu’aurait son ancien ami sur elle. Par la haine qu’elle lui vouait, elle aurait la capacité de développer son pouvoir et de devenir une puissante Reine.

Sa véritable puissance… La rage qu’elle avait sentit un peu plus tôt s’était un peu apaisée au moment de l’impact de sa magie sur le mur. Satisfait par ses réactions, Aleksander l’invita à recommencer, plusieurs fois, le même exercice. Immobile, la rousse ne prêtait pas attention aux mouvements de son instructeur dans l’espace autour d’elle. Ses paroles, en revanche, flottaient dans son esprit à mesure qu’elle se remémorait de nouveau les émotions qui l’étreignirent. Tous ses déplaisants souvenirs ne la quittaient jamais. Il n’était pas facile d’accepter ce qu’elle ressentait alors que la Reine avait toujours appris à masquer ses émotions et ses sentiments derrière un subtil masque de porcelaine. Par son enseignement, il lui permettait de se délester de ce poids d’une toute autre façon. Une manière de traiter avec les traumatismes qu’elle avait vécu, et de s’en servir comme d’une arme.

Silencieuse et immobile, ses prunelles de glace retombèrent sur le visage de son instructeur lorsqu’il se planta devant elle, sans vraiment le voir. Midona devrait désormais utiliser sa magie d’une façon plus instinctive que ce qu’elle avait pris l’habitude de faire. Première élève, elle avait toujours cherché à tout comprendre, à tout intellectualiser, tout comme sa magie. Par ce pas qui aurait pu sembler rétrograde, on lui apprenait qu’elle serait bien plus puissante en laissant aller ses émotions. Ce n’était pas un mécanisme inné chez la rousse, mais puisqu’elle voulait être plus puissante pour faire face au Yiga qui l’avait laissé pour morte, puis à son ancien conseiller, et à toutes les autres menaces qui se dresseraient devant elle, elle était déterminée à aller au bout de cette nouvelle méthodologie.

Son instructeur s’écarta et lui ordonna de reprendre. Midona se mit tout de suite à l’exercice. Sa magie rejoignit ses mains et elle fit à nouveau appel à sa rage, afin que celle-ci revienne l’envelopper de ses draps pourpres. À mesure qu’elle ressentait la haine qui l’avait accablée ce soir-là, dans son propre château, alors qu’elle aurait dû fêter son retour parmi les siens, la magie grandissant sur ses paumes. Ouvrir son cœur à la magie fut bien plus aisé qu’elle ne l’aurait imaginé, encore fallait-il qu’elle le fasse correctement. Tout ce qui était resté emprisonné en elle ne demandait qu’à en sortir. Mais pas n’importe comment.

Le premier orbe qui quitta ses mains s’écrasa sur le mur assez puissamment, mais moins que celle qui avait fait trembler la pièce quelques instants plus tôt. Ce n’était, décidemment, pas naturel pour la jeune femme que d’accepter ses émotions. Elles avaient bien trop l’habitude de sortir de façon incontrôlée, lorsqu’elle ne faisait plus tout à fait attention, ou quand elle était prise au dépourvue par la colère. Cette dernière qui avait élue domicile dans son cerveau depuis déjà quelques lunes, elle avait parfois du mal à reconnaitre sa présence à certains moments, comme si elle ne pouvait plus se souvenir de la dernière fois où elle ne l’avait pas ressentie.

Le second orbe, marqué par le doute, toucha moins férocement le mur. La Reine fit la moue devant ce résultat décevant. Le doute et le manque de confiance en elle s’étaient souvent mis en travers de son chemin. Depuis le temps où elle avait été nommée Reine à la place de son ami qu’elle espérait grand gagnant, jusqu’à aujourd’hui où elle retrouvait un Royaume bancal et cerné par les complots. Ce doute qu’elle essayait de mettre de côté, elle ne parvenait jamais réellement à s’en défaire. À la manière d’un ver creusant une pomme mûre et juteuse, il finissait par la faire pourrir de l’intérieur. Mais pourtant, elle était la Reine, c’était elle qui avait été nommée, pas lui ! Elle ne devait plus douter, elle était légitime !

La troisième boule d’ombre fut puissante bien qu’il manquât toujours quelque chose. Arrivait-elle vraiment à se détacher de toutes ses émotions ? Forcément que non, la Reine devait apprendre à s’abandonner aux émotions qui la terrassaient et la dévoraient de l’intérieur. Elle devait lâcher-prise devant la rage d’avoir été humiliée, lâcher-prise face à la tristesse de perdre les personnes qu’elle avait tant chérie, lâcher-prise devant tous les souvenirs dont elle devrait désormais faire le deuil. Il était si difficile de faire ses adieux à toutes ces choses-là.

L’ultime boule d’ombre siffla et s’écrasa avec une toute nouvelle puissance contre le mur de la pièce qui s’ébranla dangereusement à son impact. Armée d’impuissance et de douleur, l’ombre éclata contre la pierre avec une telle puissance qu’elle craignit que le plafond ne s’effondre. Après quelques tremblements, tout revint à la normale. Le château était solide même s’il avait connu de meilleurs jours. Probablement qu’elle devrait poursuivre ses enseignements en visant autre chose que le château qui s’était écroulé partiellement une semaine et demie plus tôt.

Midona voulut faire appel une dernière fois à sa magie, pour montrer à quel point elle était une bonne élève. Elle se devait de confirmer ce dernier résultat, après tout. Elle présenta à nouveau ses mains en avant et tenta de se concentrer. Un petit orbe de magie apparut puis disparu aussitôt entre ses doigts en léger sifflement. La rousse échappa un long soupir et passa une main sur son visage. Elle était au bout de ses capacités et l’épuisement étirait désormais tous ses muscles. Cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas été repoussée dans ses retranchements de la sorte.

« — Je crois que j’ai atteint mes limites. » Avoua-t-elle bien que cela fut certainement évident aux yeux de l’instructeur. « Merci beaucoup, encore une fois, pour votre juste enseignement. »

Elle fit un pas en avant et sur le côté pour faire face à l’Hesediel. Elle attrapa sa main avec une tandis que l’autre main venait refermer sa légère prise.

« — Et merci pour votre soutien. Je vous suis reconnaissante, Aleksander. » Le sourire qu’elle lui offrit fut sincère même marqué par la fatigue. « Demandez-moi ce que vous désirez et je ferais en sorte d’être à la hauteur de votre demande. » Ajouta-t-elle en plantant son regard dans le sien.

Il n’était pas obligé de lui demander quoi que ce soit aujourd’hui mais Midona espérait, un jour, pouvoir lui rendre la pareille et lui prouver à quel point elle était reconnaissante envers la famille Hesediel.

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