Entre ciel et mer | PV Ejo

Didn't you know ?
A man is an animal, too, my boy!

Robyn était en retard, en retard, en retard. Ce n'était pas de sa faute. Allez savoir comment, une brebis s'était égarée loin du troupeau. C'était du moins l'histoire qu'il avait raconté à son père lorsqu'il était revenu à la ferme, le front couvert de sueur, les sourcils froncés, mais la brave bête saine et sauve. Non ... Il savait parfaitement comment c'était arrivé.

Le Piaf aimait prendre soin des moutons. Il s'était présenté à l'enclos avec le sourire aux lèvres, prêt à leur donner à manger et à leur offrir quelques caresses, comme d'habitude. La porte de la barrière n'était pas fermée comme d'habitude. Cela l'avait fait immédiatement froncer les sourcils et le décompte n'arrivait pas. Il avait eu de la chance d'ailleurs que le reste de leur bétail soit assez docile pour résister à l'envie de suivre le mouvement et de retrouver un moment de liberté. Son familier sur les talons, cela n'avait pas pris beaucoup de temps pour en retrouver la trace, heureusement, car les bois n'étaient pas sûrs.

Robyn poussa un profond soupir. Il n'avait plus le choix. Ce n'était en effet pas la première fois que ce genre de problème arrivait. Jusqu'à présent, il avait toujours fermé les yeux, car il n'était arrivé aucun incident. Les gamins aimaient jouer ce genre de mauvais tours parce que cela les amusait sans se questionner à propos des conséquences. Il ne voyait pas d'autre explication alors qu'il était toujours très gentil avec tout le monde et qu'il rapportait même parfois des trésors aux enfants. Il allait leur flanquer une bonne frousse ! Entre ça et les remontrances de leurs parents, ils devraient retenir la leçon.

Enfin il fallait déjà que l'imagination fasse son bout de chemin afin de trouver le moyen idéal d'arriver à ses buts sans pour autant aller trop loin. Le jeune Patel se souvenait de son arrivée à Melka, il ne voulait pas que tous ses efforts pour intégrer le village soient réduits à néant. En attendant, la journée devait continuer. Tout ce travail lui avait donné faim. Il voulait essayer la nouvelle recette de soupe aux légumes devenue presque légendaire. La saison était bonne. La récolte était abondante. Un sentiment de fierté gonflait son cœur. Rien ne laissait prévoir que le malheur et la pauvreté s'abatteraient de sitôt sur Melka. Il veillait au grain de toute façon, enfin, un certain voleur charitable veillait au grain ! Un glapissement attira son attention et le sortit de ses pensées.

« Eh bien ? Tu t'es fait un nouvel ami, Hemsie ? »

Avec un léger sourire amusé, Robyn s'accroupit sur ses genoux et il approcha doucement sa main en direction du museau du renard roux pour le laisser flairer son odeur sans l'effrayer et ainsi tenter de découvrir s'il était sauvage ou apprivoisé. D'habitude, les animaux l'aimaient bien, sûrement parce qu'il était à moitié oiseau. Il n'avait jamais vraiment cherché à comprendre. Il appréciait ce fait, tout simplement. Il aurait le temps de retirer sa main à temps si c'était nécessaire. Sûrement. Peut-être. Ou pas. Zut. C'était toujours préférable que ce soit ses doigts qui soient mordus plutôt que les poulettes ou les oeufs de Madame Ydris non ? Et puis, il devait aussi protéger RrrouRrrou qui s'était posé sur son épaule pour mieux observer la scène avec curiosité. Il s'était attaché à ce pigeon, mine de rien, et il n'était pas le seul.

Tout de même, il se demandait s'il aurait un bon goût !

Didn't you know ?
A man is an animal, too, my boy!

Ejo adorait venir à Melka. Les habitants y étaient très sympathiques et il se sentait moins enfermé que dans la citadelle. C'était tout de même avec une certaine tristesse qu'il arpentait les chemins du village car bientôt il allait tout quitter pour se dévouer à son entraînement à la guilde des Magiciens. Une décision longuement réfléchie et il avait aussi les encouragements de son ami dans cette entreprise. Il ne savait pas s'il avait encore quelque chose à exploiter mais il espérait au moins réussir à se servir de ses pouvoirs plus naturellement et sans avoir besoin de la musique pour l'aider à se concentrer. Il n'y avait que son don de soin qui était purement exploitable. Il était un musicien, non un guerrier, il le savait très bien. Mais le Zora souhaitait pouvoir protéger de son mieux les personnes qui lui était cher. La guerre à laquelle il avait participé était encore bien présente et pesante sur son esprit. Même si Cantell avait échoué, cette victoire avait un goût amer pour Ejo. Il aurait pu faire mieux, empêcher son ami Piaf de mourir...Tant de choses auraient pu être éviter. C'était pour cette raison que le Zora avait un nouvel objectif en tête et Vetio n'allait surement pas être tendre avec lui. Il profitait donc de ses derniers jours de liberté en compagnie de ses deux animaux de compagnie. Nymor et Dixie s'entendaient à merveille, même si il était bien plus facile de dresser un chien qu'un renard toutefois. La petite boule de poils orange avait encore disparue et Ejo s'était mis à sa recherche, suivant le chien loup qui reniflait le sol. Le renard n'était cependant pas sauvage non plus et ne savait pas chasser, étant donné qu'Ejo l'avait recueilli quand il n'était qu'un petit renard tout mignon. Le musicien craignait surtout que son ami soit tombé sur un sanglier ou pire, un chasseur. Surtout que la piste l'avait conduit dans des bois.

- Par Jabu...Faites qu'il n'ait rien

Pria-t-il avant d'entrer dans la forêt tout en criant le nom du renard. Répondait-il lorsqu'on l'appelait ? Pas toujours. Il restait un renard et surtout têtu. Nymor s'était arrêté, se mettant soudainement à grogner et il n'avait pas fallu longtemps à Ejo pour en connaître la raison en voyant un homme penché vers son renard. Chose étrange, il avait un pigeon sur l'épaule. Le Zora caressa la tête du chien-Loup pour le calmer avant de s'avancer joyeusement, se disant qu'une personne qui se baladait avec un pigeon ne pouvait pas être mauvais.

- Bonjour ! Je vois que vous avez trouvé mon ami

Son renard avait redressé les oreilles, reconnaissant la voix du Zora et laissa tomber le Piaf pour courir vers le musicien et jouer entre ses jambes, manquant de peu de tomber.

- Ah moi aussi je suis content de te voir

Il se baissa pour caresser le renard et lui faire des papouilles avant de se rappeler qu'il n'était pas tout seul. Mieux encore, il aperçut une renarde qui se tenait au côté de l'homme-pigeon.

- Oh vous avez un renard aussi. Coucou toi, moi c'est Ejo

Le Zora fouilla dans sa poche et tendit sa main où reposait des morceaux de viandes séchées doucement vers l'animal avec un sourire.

Didn't you know ?
A man is an animal, too, my boy!

Robyn sourit de bon cœur en voyant bien que le renard acceptait les petites caresses sur le sommet de sa tête. Voilà qui le rassurait ! Il y en avait déjà assez avec les monstres qui rôdaient dans les bois, s'il fallait en plus se soucier de la nature au quart de tour, ce serait pas demain la veille que son père allait pouvoir se reposer. Au moins, sa jambe ne le faisait plus souffrir autant : bien que le jeune Patel ne pouvait pas s'empêcher de se demander si c'était une bonne chose ou si ce n'était pas juste pour le rassurer. Au moins, il lui faisait plus confiance pour s'occuper de la ferme, même si Robyn avait du mal à saisir pourquoi ils ne pouvaient pas demander un petit coup de pouce au reste de la famille, mais c'était peut-être une question de fierté mal placée.

Ou alors, il était inévitable que des rumeurs pointent le bout de leur nez depuis que son épouse avait mystérieusement disparu, déjà que c'était une Piaf qui avait attiré quelques ennuis jusqu'ici. Leur fils avait appris à ignorer les petites remarques, mais il aurait peut-être dû y faire plus attention ? Il rentra le menton contre son cou, le visage sombre, contrarié et perturbé, devant cette possibilité qui venait d'effleurer son esprit. Sa mère n'avait rien demandé de tout ça. Elle aurait sûrement préféré pouvoir devenir invisible et se faire oublier des Cantell – et d'Hebra par extension – pour de bon. Mais Valoo n'était pas toujours clément, selon ses dires. Ça avait toujours arraché un petit sourire ironique à Robyn en grandissant.

Bon ... C'est pas tout ça, mais il avait encore une faim de loup. Il pourrait poser des questions au village pour savoir si un visiteur n'était pas présent par hasard et avait perdu de vue son animal de compagnie. Les renards sont assez rusés et aiment parfois fouiner par curiosité, un moment d'inattention et c'était foutu. Si le petit oiseau ne trouvait rien, il déciderait en temps et en heure de veiller sur l'animal, peut-être, en espérant qu'il n'avait pas été abandonné, ce serait vraiment trop triste. Oh ! Voilà un homme qui venait justement dans sa direction. Avec un ... loup ? à ses côtés. Attendez, quoi ?

C'est encore tout étonné et la bouche légèrement entrouverte que le Piaf observa la scène qui se déroulait devant lui comme si c'était parfaitement naturel ! Il n'avait jamais entendu parler de ce genre d'histoires, et pourtant, sa mère en connaissait déjà beaucoup quand il était tout petit. C'est sûr qu'il ne possédait pas une encyclopédie des bêtes sauvages de la région. Dire qu'il pensait avoir tout vu dans ses voyages, on ne cessait pas de le surprendre, c'était extraordinaire et cela remettait un peu de soleil dans cette journée qui avait mal commencé.

« J'ai bien peur qu'elle va me laisser de côté pour ces bons morceaux de viande ! » rit-il finalement, tout doucement, en secouant la tête de gauche à droite. Il n'était pas vraiment inquiet, juste taquin.

Le nouveau venu ne devait pas être bien méchant puisqu'il venait d'amadouer Hemsie en deux secondes. En plus, avec un sourire comme ça, malgré sa petite mésaventure qui lui avait fait quitté les sentiers battus, ils étaient faits pour s'entendre ! D'ailleurs, à ce sujet ... En l'observant plus attentivement, le grand voleur se gratta le nez, pensif. Allez, ça ne coûtait rien de demander.

« Dites moi, on ne s'est pas déjà croisé quelque part ? Moi c'est Robyn ! »

Certes, c'était une phrase qui était parfois parfaite pour faire du gringue, tel qu'il les connaissait presque toutes, mais il était sincère. Sa tête lui disait quelque chose. Il n'arrivait pas encore à mettre le doigt dessus, mais il avait une assez bonne mémoire des personnes qui croisaient sa route. Ça lui reviendrait bien assez vite. Ejo ... Ejo ... Au marché peut-être ? Il était curieux de savoir ce qui l'amenait à Melka mais chaque chose en son temps.

Didn't you know ?
A man is an animal, too, my boy!

Ejo était heureux d'avoir retrouvé son ami à quatre pattes, qui ne semblait pas non plus blesser. C'était aussi cela le problème d'avoir un animal sauvage comme compagnie, il n'était pas évident de l'avoir tout le temps près de soi. Dixie restait toutefois un peu dressé, le Zora lui avait appris à ne pas mordre les humains et à ne pas voler de la nourriture sur les étalages. Si c'était par terre, ne constituait pas un crime. Le renard restait toutefois souvent en dehors de la ville pour éviter un problème mais il y avait toujours un risque que le petit animal croise la route de chasseur ou d'un monstre affamé. Même s’il mangeait plus des sangliers de ce que le jeune musicien avait retenu. Enfin, il ne pouvait pas vraiment déterminer si le piaf qui se trouvait là était un gentil ou pas - il restait un piaf et il était un peu méfiant naturellement depuis la bataille sur l'Île du Dragon. Pas qu'envers les personnes possédant des ailes, mais en générales. Mais cet homme avait lui aussi un renard et pas que, Ejo avait cependant jeté son dévolu sur le mammifère en l'appâtant avec de la viande séchée qu'il avait toujours sur lui.

- Oh, vous inquiétez pas, elle sait qui est son véritable amie...hein ma belle

Déclara-t-il en caressant la renarde. Le Zora avait stoppé son geste à la question de son interlocuteur, pour ensuite se relever. Il regarda l'homme avec réflexion avant de soudainement taper du poing dans la paume de son autre main.

- Oui ! Au marché de Melka ! Et bien avant il me semble que nos chemins se sont croisés sur les routes et je vous ai offert une pomme car vous aviez l'air affamé ! Et bien, heureux de vous revoir Robyn !

Expliqua-t-il avec un sourire, heureux finalement de croiser un visage familier dans ces bois. L'endroit n'était peut-être pas sûr avec des monstres ou des bêtes sauvages agressives. Mais en tous les cas, Robyn semblait se porter mieux que la première fois qu'ils s'étaient rencontrés.

- Je trouve ça assez drôle qu'un piaf ait un pigeon comme animal

Rajouta-t-il sans masquer son amusement. C'était comme si de son côté il prenait une carpe comme ami même si Ejo jouait avec les poissons lorsqu'il le pouvait. Malheureusement, ce n'était pas facile de trouver un endroit tranquille pour se baigner.