Le soleil se levait doucement sur Lanelle, caressant la surface paisible des eaux scintillantes de sa lumière dorée. Nadë, se tenait au bord du lac, observant l'horizon avec une sérénité retrouvée. Depuis son retour, il y a un mois, après une année de péripéties et d'aventures loin de son foyer, elle avait décidé de se consacrer aux autres plutôt qu'à ses propres épreuves. La décision de ne pas reprendre son poste d'Ambassadrice de Lanelle avait surpris beaucoup de ses pairs, mais La Zora était déterminée à suivre une nouvelle voie. Assistante d'un guérisseur renommé, elle passait désormais ses journées à soigner les malades et les blessés, utilisant sa maîtrise de la magie de l'eau pour désinfecter et nettoyer les plaies. Cette nouvelle vocation lui apportait une satisfaction profonde, bien plus que la diplomatie et les intrigues de la cour ne l'avaient jamais fait.

Après sa contemplation, Nadë se dirigea vers le Domaine Zora avec grâce et détermination, où elle avait prévu de retrouver quelqu’un. Son passé, bien que tumultueux, l’avait préparée à devenir la personne qu’elle était aujourd’hui ; une guérisseuse en devenir, animée par un désir profond de faire le bien autour d’elle. Mais parmi tous ceux qu’elle aidait, il y en avait un qui comptait plus que les autres : Zachary.

Le prince d’Hyrule, son ami d’enfance, son amour secret depuis toujours. Leur séparation avait été déchirante, si brutale et jusqu’à récemment, elle ne savait même pas s’il était encore en vie. Leur retrouvaille avait été une bénédiction inattendue, une lumière au milieu de l’obscurité de son année d’errance. Se retrouver, s’avouer leurs sentiments réciproques, avait été une bouffée d’air frais pour la naïade. Cependant, le Zachary qu’elle avait retrouvé n’était plus le même que celui qu’elle avait connu autrefois. Il n’était plus que l’ombre de lui-même, hanté par les traumatismes de sa captivité. Nadë s’était alors dévouée corps et pale à sa guérison, déterminée à l’aider à surmonter ses blessures, même les plus profondes. Elle savait qu'il fallait du temps et beaucoup d'amour pour le voir renaître de ses cendres. Son cœur se serrait à chaque fois qu’elle le voyait lutter avec ses démons, mais elle resterait à ses côtés, inébranlable.

Et depuis quelques jours, l’Hylien séjournait à Lanelle ! Une idée qui avait empli la Zora de joie et d’espoir. Non seulement, elle pouvait veiller sur lui de plus près, mais cela signifiait aussi qu’ils pouvaient commencer à construire un avenir ensemble. Zachary lui avait demandé sa main, et elle avait bien évidemment dit oui, le cœur battant de bonheur.

Alors que la nuit tombait et que la sirène arrivait devant l’habitation des Nohansen, elle ne pouvait s’empêcher de sourire. Elle savait que le chemin serait long et parsemé d'obstacles, mais elle était prête à le parcourir aux côtés de son ami. En approchant de la demeure, Nadë remarqua qu'il y avait très peu de lumière à l'intérieur, ce qui lui sembla étrange. Elle sentit une légère inquiétude monter en elle. À peine eut-elle frappé à la porte qu'un serviteur l'accueillit et, d'un ton discret, lui indiqua que le prince se trouvait dans le petit salon. La Zora pénétra dans la demeure, suivant le serviteur à travers des couloirs faiblement éclairés. En arrivant devant le petit salon, elle remarqua que la pièce était plongée dans une semi-obscurité, à peine éclairée par quelques chandelles vacillantes. Son inquiétude grandit encore. Que se passait-il pour que Zachary soit dans une telle pénombre ? Elle entra doucement dans la pièce, ses yeux cherchant la silhouette du prince. Elle le trouva finalement, recroquevillé dans un coin, tremblant, une lettre entre les mains. Le cœur de Nadë se serra à cette vue. Elle s'approcha lentement, ses pas à peine audibles sur le sol.

« Zachary ? » Murmura-t-elle doucement, s'agenouillant à ses côtés. Le prince leva les yeux vers elle, et elle put voir la douleur et la peur dans son regard. Sans un mot, elle posa une main réconfortante sur son épaule, puis l'enveloppa dans ses bras, essayant de lui transmettre toute la chaleur et la sécurité dont il avait besoin en ce moment. « Que s'est-il passé ? » Demanda-t-elle doucement, ses doigts caressant ses cheveux avec tendresse.

Avec une profonde inspiration, l’Hylien expliqua d’une voix brisée que Sena la Douce était morte. Nadë sentit un frisson glacial descendre le long de sa colonne vertébrale. La petite Kokiri avait, elle aussi, été enlevée par les Yigas… Zachary tendit la lettre ornée du sceau royal du bout des doigts à la Zora. Elle prit la lettre avec précaution et commença à la lire, son cœur battant de plus en plus vite. Pendant qu'elle parcourait les lignes de l'écriture sévère et officielle, Zachary ajouta d'une voix empreinte de désespoir que cela aurait pu être la jeune femme et qu’il n’avait rien fait pu faire…
Nadë sentit ses yeux s’embuer alors qu’elle finissait de lire la terrible nouvelle. Elle replia soigneusement la lettre et posa une main réconfortante sur la joue du blond. « Ce n’est pas ta faute. » Murmura-t-elle avec une douceur infinie. Elle serra Zachary contre elle, son cœur battant à l'unisson avec le sien. « Je suis là maintenant, » dit-elle doucement. « Et nous allons surmonter cela ensemble. »

Après un moment de silence, il prit une profonde inspiration et dit d’une voix tremblante que la jeune femme ne pouvait pas l’épouser sans savoir ce qui lui était vraiment arrivé et qu’elle pouvait même changer d’avis. Nadë recula légèrement pour pouvoir le regarder dans les yeux, ses mains toujours posées sur ses épaules. Son cœur se serra en voyant la douleur dans son regard. Elle savait que, malgré ses paroles rassurantes, elle ne pouvait même pas imaginer la moitié de ce qu'il avait dû endurer. Les Yigas étaient connus pour leur cruauté et leur sadisme, et l'idée que Zachary ait dû subir leurs tortures la remplissait d'une tristesse indicible. Cependant, elle se força à rester forte pour lui, à lui montrer qu'elle était là, peu importe ce qu'il avait traversé. « Zachary, » dit-elle doucement. « Je t’aime. Peu importe ce que tu as vécu, ce que tu as enduré. Rien ne peut changer ce que je ressens pour toi. »

Nadë se tenait immobile, ses mains tremblantes légèrement en écoutant Zachary. La mention des guérisseurs raviva en elle des souvenirs vifs des conversations qu'ils avaient eues, des noms qu'elle avait recommandés avec tant de confiance. Les Zoras étaient célèbres pour leurs talents de guérison, et elle avait espéré, peut-être naïvement, que ces guérisseurs pourraient apaiser les souffrances de son bien-aimé. Elle se souvenait de son regard désespéré lorsqu'il lui avait demandé des noms, de son cœur lourd alors qu'elle avait évoqué les meilleurs soigneurs du domaine. Elle avait vraiment cru que cela pourrait l'aider, qu'ils pourraient alléger ses peines. Mais maintenant, en voyant l'expression de l’Hylien, elle comprenait que ces espoirs étaient vains.

La naïade sentit son cœur s’emballer alors que Zachary, d’une voix grave et résignée, murmura qu’elle devait peut-être le voir. Elle le regarda, l’incompréhension se mêlant à l’appréhension dans ses yeux bruns. Elle n’avait aucune idée de ce qu’il allait lui montrer, mais elle savait déjà que ce serait quelque chose de difficile à voir. Le prince commença à déboutonner sa chemise, et Nadë remarqua que ses doigts tremblaient. Elle le regarda faire alors que chacun de ses mouvements, lent, lui sembla durer une éternité. Ses yeux se fixèrent sur ses mains, puis remontèrent le long de son torse. Elle se souvenait des nombreuses fois où elle avait imaginé ce moment, rêvé de voir le corps de l’homme qu’elle aimait, de toucher sa peau avec tendresse. Mais ce qu’elle s’apprêtait à découvrir n’avait rien à voir avec ses rêves.

Lorsque la chemise de Zachary glissa de ses épaules et se retourna, Nadë eut du mal à réprimer un cri d’horreur. Son corps était un champ de bataille de cicatrices et de mutilations. Des marques profondes et irrégulières parcouraient sa peau, vestiges des terribles tortures qu’il avait endurées. Chaque cicatrice racontait une histoire de douleur et de souffrance, une histoire que la jeune femme ne pourrait jamais vraiment comprendre. Mais ce qui attira le plus son attention fut le nom gravé dans sa chair : Tenebrae … Les lettres étaient nettes et cruelles, comme si elles avaient été gravées avec une précision délibérée et malveillante. La Zora sentit une vague de nausée monter en elle. Voir ce nom, ce rappel constant de ce qu’il avait subi lui brisa le cœur…

Elle tendit une main tremblante vers lui, hésitant à le toucher de peur de lui faire encore plus de mal. Ses yeux se remplirent de larmes, mais elle les refoula, déterminée à rester forte. Pour lui. « Par Jabu… » murmura-t-elle, sa voix étranglée par l’émotion. Elle ne trouvait pas les mots pour exprimer ce qu’elle ressentait. La douleur. La couleur. L’impuissance. Toutes ses émotions se mélangeaient en elle, formant un tourbillon de sentiments difficiles à maîtriser pour la jeune femme.

La Zora prit une profonde inspiration, essayant de calmer ses pensées chaotiques. Zachary avait besoin d’elle maintenant, plus que jamais. « Je suis tellement désolée… » dit-elle finalement, sa voix sonnant à peine plus fort qu’un murmure. Elle se rapprocha alors de lui, ses doigts effleurant finalement doucement son dos, comme pour apaiser une douleur qu’elle était incapable de véritablement comprendre.

Zachary resta silencieux pendant quelques secondes, puis, lentement, il s’éloigna et renfila sa chemise, recouvrant les marques de son dos. La naïade sentit un vide soudain alors qu’il se détachait d’elle. Sa main, encore levée, resta suspendue dans l’air, comme si elle cherchait quelque chose à saisir. Finalement, elle la ramena près d’elle, serrant le poing avec force. La sensation était étrange, comme si Nadë venait de se brûler, à moins que ce ne soit l’inverse ? Peut-être était-ce le froid bordant de la réalité, la douleur de voir son amour blessé si profondément, qui la faisait réagir ainsi. Elle baissa les yeux vers sa main, ses ongles s’enfonçant dans sa paume. La douleur physique était une distraction bienvenue pour contrer l’angoisse qui la submergeait. Elle avait tant voulu le réconforter, apaiser ses souffrances, mais en cet instant, elle se sentait impuissante, comme si son amour ne suffisait pas…

La sirène sentit un frisson glacé parcourir son échine lorsque Zachary reprit enfin la parole. Elle. Tenebrae. Le nom gravé dans sa chair prenait soudain une dimension encore plus terrifiante. Nadë sentit son cœur se serrer à l’évocation de cette terrible personne. La Yiga s’infiltrait donc dans les rêves du prince, détruisant ses espoirs et ses aspirations les plus intimes. Le visage de la Zora pâlit. Elle pouvait sentir la détresse dans la voix de Zachary, une détresse qui allait bien au-delà de la souffrance physique. Les cicatrices sur son corps étaient horribles, mais c'étaient les cicatrices sur son âme qui laissaient Nadë désemparée. Elle serra à nouveau les poings, cette fois pour réprimer les larmes de rage et de tristesse qui menaçaient de jaillir.

L’Hylien se retourna ensuite, et la jeune femme fut frappée par l'intensité de ses paroles. L'idée que Zachary puisse douter de la réalité, craignant que tout cela ne soit qu'une illusion créée par la Yiga, la bouleversait profondément. La terreur dans ses yeux la laissait sans voix, chaque mot révélant un peu plus de l'ampleur de son traumatisme. Cherchant a rassurer le prince, la Zora commença doucement à secouer la tête, mais elle s’arrêta net quand il ajouta qu’il avait rêvé d’elle.

 À ces mots, Nadë senti son cœur se serrer encore plus fort. Elle comprenait maintenant l’étendue de son désarroi. Ses rêves auraient dû être un refuge, un lieu où il pouvait trouver un peu de repos, de pas et d’espoir, mais même là, Tenebrae l’avait traqué, empoisonné.

La naïade relâcha finalement ses poings et leva doucement une main tremblante pour toucher le visage du blond. Ses doigts effleurèrent sa joue avec une douceur infinie, cherchant à apaiser son tourment. « Zachary… » Murmura-t-elle, la voix emplie de tendresse et de détermination, malgré ses larmes qui menaçaient de déborder. « Ce n’est pas stupide. Ce que tu ressens est naturel après tout ce que tu as traversé. Mais je suis là, avec toi, dans la réalité. Tu as réussi à fuir, et elle ne peut plus t’atteindre. » 

Nadë plongea son regard dans le sien, essayant de lui transmettre toute la force et l’amour qu’elle ressentait. « Quand tu rêvais de moi, c’était ton cœur qui se souvenait de ce qui était réel, de notre lien. Peu importe ce qu’elle a fait pour te troubler, ce que nous avons est plus fort. » La Zora comprit alors que si Zachary avait rêvé d'elle, ces rêves avaient dû être terrifiants, empreints de douleur et de désespoir, connaissant le sadisme de ses geôliers. Elle n'osait même pas imaginer les horreurs qu'elle avait pu incarner dans ses songes pour le troubler à ce point. L'idée que son propre visage, son propre être, ait pu être transformé en instrument de torture par Tenebrae lui était insupportable.

Malgré ces pensées, Nadë se rapprocha encore de lui, son front touchant doucement le sien. Elle sentait la chaleur de son souffle contre sa peau, et cette proximité lui donnait la force de continuer. « Nous allons affronter cela ensemble. » Murmura-t-elle avec sa voix douce « Chaque jour, chaque nuit, je serai là pour te rappeler où tu es, qui tu es, et que tu es libre. Tu es libre Zachary ! » Elle savait que les cicatrices visibles et invisibles du prince prendraient du temps à guérir, mais elle l’accompagnerait à chaque étape du chemin. Ensemble, ils pouvaient surmonter les ombres du passé et construire un avenir lumineux. Nadë espérait que son amour serait une ancre pour l’Hylien, un rappel constant que, malgré les horreurs du passé, ils avaient un futur à partager et à protéger.