In this house of mine nothing ever comes without a consequence • Robyn Patel

Lorsqu’il lui montra son aile blessée, Midona coula son regard sur celle-ci et effleura les plumes de ses doigts. Elle se souvenait très bien s’être assoupie contre celles-ci lorsqu’elle rentrait à Metzli. C’était un souvenir embarrassant mais pour lequel elle éprouvait de la tendresse. Peu de temps avant qu’elle ne se retrouve le visage dans ses plumes, il avait fait en sorte de changer ses vêtements pour qu’ils voyagent dans l’anonymat. À croire qu’il avait un problème avec ses vêtements pour qu’il cherche toujours à lui en faire porter d’autres. Elle n’avait pas besoin de se faire passer pour une autre cette fois-ci puisqu’elle osait espérer qu’être elle-même lui permettrait de se rapprocher entièrement de l’homme qu’elle désirait. Il n’y avait qu’elle pour savoir réellement ce qui pourrait plaire à l’homme ténébreux de ses songes, et qu’importe à quel point Robyn se croyait légitime à ce sujet.

« — Tu devrais passer voir l’un de mes médecins… Au moins pour s’assurer que cela se répare correctement. » Dit-elle en retirant ses doigts des plumes.

Est-ce que ses médecins sauraient seulement prendre en charge une injurie sur une aile alors que les Twilis en étaient dénués ? Elle n’en était pas sûre, mais il devait bien y avoir des os là-dedans, et ils savaient réparer des os. Encore faudrait-il qu’il accepte de se laisser examiner, ce qui n’était probablement ses intentions puisqu’il semblait si méfiant. Elle était même prête à l’accompagner si cela pouvait le rassurer, tant qu’il n’essaye pas de lui faire faire un crochet par une boutique de vêtements. Oh, il en serait capable.

« — Oh oui, je t’ai vu blanc et sanguinolent, et non pas vraiment retomber sur tes pattes. » Railla-t-elle en roulant des yeux. « Ne sois pas plus têtu que nécessaire. »

Elle soupira et, bien que le contact de sa main sur la sienne la crispa un instant, elle ne se déroba pas à son contact. Surprise quand il lui demanda de l’aide pour apprendre la magie, elle secoua légèrement la tête et détourna le regard dans un premier temps.

« — Tu es sûr de vouloir t’entrainer à la magie ? Mon château est déjà assez détruit comme ça. » Fit-elle avec un sourire espiègle, faisant référence au type de magie qu’il utilisait. « Tu crois que j’ai une tête à enseigner la magie à quiconque ? La plus grande qualité d’un professeur est sa patience. J’en suis totalement dénuée. » Sans compter qu’elle était un peu trop impulsive pour prendre cette place qui demandait une certaine sagesse.

Ses pupilles glissèrent de nouveau sur son visage pour remarquer qu’il était perdu dans ses pensées, son visage s’était renfrogné, et il marmonnait des choses peu intelligibles sur un « affreux sorcier », une « grande pie », et d’autres petites insultes qu’il murmurait dans son menton. Midona pencha la tête de côté pour le regarder tandis qu’il s’énervait tout seul dans son coin. Elle sourit, amusée.

« — Tu t’es entiché de la fille du meilleur professeur que je connaisse. Même Sebastian pourrait t’aider… S’il le voulait. » Probablement qu’il passerait davantage de temps à se moquer de lui s’il en était question. L’homme était assez rancunier pour lui faire vivre un enfer. Elle réfléchit à sa dernière leçon qui avait été particulièrement difficile, pour tout ce qu’elle avait remué. « Si j’avais un conseil à te donner, je te dirais de simplement te lancer. La magie s’apprend de la même manière que n’importe quelle arme, à force d’entrainements et de rigueur. Tu as bien dû t’entrainer pour utiliser ton arc, non ? C’est la même chose. J’ai appris récemment qu’il était également question de la libération de ses émotions. C’est un équilibre difficile à trouver, je crois. » Elle serra un peu sa main entre ses doigts. « Tu n’es déjà pas mauvais. Avec un peu plus d’entrainement, tu pourras probablement la tenir plus longtemps. Apprends déjà à l’accepter, cette magie. Ce n’est pas une malédiction. C’est ce que tu en fais, qui est le plus important. »

Elle croyait en lui puisqu’elle n’avait aucune raison de ne pas le faire. Si elle avait émis des doutes au sujet de sa magie, elle était maintenant de plus en plus persuadée que son ami ne pouvait pas être un homme manipulateur qui œuvrait dans l’ombre pour la détruite. Elle espérait sincèrement que le reste de la cour et de son entourage verrait la même chose et ne le considérerait comme un manant de la plèbe qu’il vaut mieux éviter. Avoir les bons sentiments de la Reine Crépusculaire en personne lui serait précieux pour être considéré comme autre chose qu’un étranger, même s’il ne le voyait pas encore. La réflexion de Robyn sur ses conseils lui arracha un sourire. Elle ne faisait que répéter ce qu’on lui avait dit et prendre en compte ses expériences. Pour le reste, elle en était persuadée, si elle devait enseigner patiemment à quelqu’un, elle finirait par s’agacer. De plus, ses devoirs lui demandaient d’être présente ailleurs que dans une salle de classe.

« — Si tu le dis… On verra ce que tu en penses lorsque je t’aurais hurlé dessus parce que tu ne réussis pas l’exercice du premier coup. » Rétorqua-t-elle avec un sourire. Après réflexion, elle lui avait souvent hurlé dessus sans qu’ils ne soient dans ce contexte, peut-être en aurait-il l’habitude.

Elle le suivit du regard lorsqu’il se leva pour essayer de mettre la main sur le majordome dans sa quête de thé et de petits biscuits. S’il ne passait pas son temps à balancer du thé partout, il n’aurait pas besoin de courir après ce dernier. L’homme avait dû s’éloigner de la pièce avoir été la cible de sa colère puisqu’il savait qu’il valait mieux prendre ses distances quand cette émotion traversait un membre de la famille Vajanská. Midona se releva et fit un pas en avant pour essayer de le retenir avant qu’il ne parte s’enquérir du majordome. Elle posa une main sur son bras pour l’arrêter mais ce ne fut pas le contact de sa main qui l’arrêta. Elle n’en prit pas conscience tout de suite.

« — Attends, tu ne dev- » Sa voix mourut lorsqu’elle entendit des pas approcher.

Cette démarche, ce ne pouvait être que la personne qu’elle n’aurait pas souhaité croiser tout de suite. Le sang de Midona se figea, son cœur manqua un battement. Oh non, il n’était pas censé revenir si vite. Un frisson lui tomba dans le dos et elle secoua lentement la tête quand Robyn fit sur un ton presque amusé, que cela était probablement un subterfuge pour qu’il voit un médecin. Elle aurait préféré. Quelques secondes avant l’impact, elle se dépêcha de relâcher le bras de Robyn avant qu’il n’aperçoive ce contact. Trop tard, rien n’échappait au regard perçant de cet homme.

« — J’ai cru rêver quand j’ai vu les gardes devant la maison. La Reine Crépusculaire, elle-même, qui vient visiter son vieux père, précisément lorsqu’il n’est pas là. Depuis quand viens-tu en cachette, ici ? » Son regard aussi glacial que celui de sa fille, sa voix aussi froide que pouvait l’être celle de la rousse lorsqu’elle était en colère. « C’est qui, celui-là ? »

Midona déglutit, le sang montant furieusement à ses joues pour les peindre d’écarlate. Elle voulait garder son calme, ne pas perdre ses moyens devant Robyn et face à son paternel, mais elle était prise au piège et savait qu’elle ne pourrait pas contenir la colère qui menaçait de déferler sur son ami, et encore davantage sur elle.

« — Père… » Sa voix était soudainement incertaine. « …C’était exceptionnel… » Elle s’avança un peu plus et hésita quelques secondes, pendant lesquelles son père n’ôta pas ses prunelles de glace sur le Piaf. Elle n’avait plus le choix maintenant qu’il faisait face à son ami. « …Je vous présente Robyn Patel, il m’a aidé lorsque j’étais en Hyrule… » Elle ne savait pas comment s’expliquer sans se sentir affreusement coupable de ne pas avoir choisi un autre endroit pour se retrouver.

Rendal dévisagea longuement Robyn, les lèvres pincées, ses prunelles s’arrêtant tout particulièrement sur les ailes du Piaf. La rousse sentait tout son corps crispé à son paroxysme, tant elle se trouvait dans l’attente du jugement qui ne tarderait pas à venir. Puis, d’un geste rapide et mesuré, son paternel attrapa brusquement le col de Robyn, serra ses doigts sur la peau du pauvre homme à mesure qu’il serrait sa propre mâchoire. Le pauvre Piaf devrait être habitué désormais, à être attrapé de cette manière.

« — Tu invites tes petits copains chez moi, maintenant ? » Gronda-t-il sans la regarder, d’une voix presque calme. « Je le savais bien, que tu avais rencontré quelqu’un. » Ses iris se fixèrent sur elle, désormais. « J’ai failli te croire… L’emmener ici, vraiment ?! » La voix de son père grimpait peu à peu à mesure qu’il s’enveloppait de colère. Au moins Robyn comprendrait vite d’où lui venait son impulsivité.

Midona se renfrogna et agrippa les bras de son père pour le faire lâcher, plantant ses ongles dans la peau.

« — Lâchez-le ! Vous jugez sans le connaitre, c’est un homme bien ! » Tenta-t-elle d’ordonner, sans grand succès.

L’homme tenait Robyn avec colère et fermeté tandis que son regard passait du Piaf à sa fille. Celle-ci ne pouvait décemment pas faire lâcher son père, tiraillée par l’envie de le repousser violemment mais sachant qu’un tel geste provoquerait une rage noire de la part de celui-ci.

« — Et ?! Tu vas le marier comme Xanto Odair a marié cette Zora ?! N’en as-tu rien à faire de la pureté de notre lignée ?! » Et voilà qu’il se mettait à hurler. « Il n’a rien à faire ici ! N’as-tu rien d’autre à faire, Midona, comme retrouver le traitre ?! »

Les sourcils froncés, Midona secoua la tête mais ne répondit rien. Elle n’avait pas envie de se lancer dans une joute verbale maintenant, et surtout pas en présence d’un témoin. Il reporta son attention sur le Piaf qu’il tenait toujours au bout d’une poigne de fer.

« — Qu’as-tu fait à ma fille ? » Des paroles pleines de sous-entendues, accueillies par un grognement outré de la part de la première concernée.

La poigne de Rendal était particulièrement féroce et s’assurait que le Piaf ne s’échapperait pas tant qu’il n’aurait pas répondu à ses questions. S’il avait pu le faire, il l’aurait étranglé pour la simple et bonne raison qu’il s’était introduit dans sa maison et qu’il était hors de question qu’un étranger passe cette porte, encore moins sans qu’il ne soit au courant d’un tel manège. Sa fille en entendrait parler, et, au regard qu’elle lui lançait, elle le savait et le redoutait déjà. Les petites blagues ne faisaient pas rire le père Vajanská, comme elles n’avaient pas fait rire la fille quelques lunes auparavant, encore un trait similaire dans la parenté des deux roux dans la pièce. Les ongles de Midona avaient beau se planter dans la peau du bras de Rendal, celui-ci ne semblait pas prêt à lâcher, mais elle ne pouvait décemment pas le laisser étrangler impunément son ami. Elle réfléchit à ce qu’elle pouvait dire pour qu’il relâche le Piaf. Elle ne pouvait pas utiliser sa magie ! Si elle osait faire une telle chose, il la tuerait ! Mais elle était Reine, elle ne pouvait pas se laisser mener par le bout du nez comme lorsqu’elle était enfant ! La rousse secoua vivement la tête, prit son courage à deux mains.

« — Je vous interdis de-… » Un cri de douleur lui coupa la parole et elle se tut instantanément, mortifiée.

Il lui avait mordu la main ! Robyn avait mordu la main de son père ! Estomaquée, elle se mordit la lèvre inférieure, ne s’attendant évidemment pas à une telle réaction, même venant de lui. Mordre son père ! Elle n’en revenait pas. Qu’est-ce qui avait pu lui passer par la tête ?! Midona le dévisagea d’un air incrédule, cette action stupide sortait de toutes bonnes convenances de la haute noblesse de Metzli. Ses mains relâchèrent immédiatement les bras de son père pour se poser sur ses propres lèvres pour dissimuler vainement son expression d’effroi. Est-ce qu’il voulait mourir ? Car il était sur la bonne voie si tel était son désir. Son père retira vivement sa main et la massa douloureusement en poussant un juron, le regard plus noir sur le Piaf et sur sa fille, que si cette dernière lui avait réellement dit qu’elle avait des prétentions sur cet étranger. Le sang de la rousse s’était glacé dans ses veines, craignant que Rendal ne se venge en utilisant sa magie, tant il prendrait cet affront comme le pire jamais vécu. Il ne supportait pas que sa fille lui donne tort et il n’était déjà pas tendre avec elle, alors avec un homme qui ne venait pas d’ici… Assommée, elle se trouva bien incapable de réagir ou de lâcher Robyn des yeux dans cette même expression d’effroi.

« — Ce CHIEN m’a mordu ! » Rugit son père, s’apprêtant à attraper de nouveau Robyn pour lui faire regretter son geste.

Il n’en eut pas le temps car le Piaf revenait à la charge, pointant un doigt accusateur contre le torse de son père qui se trouva aussi interloqué que sa fille devant le courage stupide dont il faisait preuve. Quant à Midona, elle se mortifiait encore davantage, incapable de réagir et ne désirant pas le faire, non plus. Pour être prise entre deux feux ? Surement pas ! Elle blêmit dès les premières paroles balancées dans le visage de son paternel et son visage continua de blêmir à mesure qu’il parlait, utilisant tout ce qu’elle avait eu le malheur de lui dire quelques temps plus tôt. Oh, cela lui apprendrait à en dire trop à cet homme. Il aurait au moins pu démentir l’accusation de son père, au lieu de renforcer ses suspicions avec ses sous-entendus ! Elle portait toujours ses mains sur son visage cramoisi, essayant de calmer les palpitations de son cœur malmené, et de garder son calme. Le coup de grâce fut, bien évidemment, l’évocation du Twili. Midona jeta un regard glacial à Robyn, qui saurait y lire à quel point elle désirait le tuer désormais, et qu’elle le ferait si son père ne prenait pas les devants. Alors qu’elle lui avait dit de tenir sa langue, voilà qu’il vendait la mèche à la première personne qu’il croisait !

La conclusion la pétrifia. Sous ses yeux ébahis, il venait d’insulter ouvertement son père. Son regard était passé du visage de ce dernier à celui de Robyn pendant qu’il développait son monologue, mais face aux insultes qu’il proférait directement au visage de Rendal, elle eut soudain l’irrépressible envie de disparaitre, ou de s’exiler à nouveau en Hyrule. Partout, pourvu qu’elle soit hors de cette maison. Lorsque sa voix mourut et que le silence assourdissant leur tomba dessus, elle se rendit compte qu’elle était en apnée et inspira profondément. Elle prit également conscience qu’elle s’était, petit à petit, campée sur ses jambes dans une position de défense, prête à user de sa propre magie pour faire barrage à celle de son père si cela devait arriver à de telles extrémités. Le désir de meurtre se reflétait dans les pupilles folles de son paternel et elle était étonné qu’il n’ait pas encore attaqué son ami.

« — Pour qui tu te prends, à me parler de la sorte, dans ma propre demeure ! » Hurlait-il en retour avec rage. « Je ne vais pas me laisser insulter de la sorte, Midona ! » Grondait-il à nouveau en se tournant finalement vers sa fille, la fusillant d’un regard de glace, lui provoquant une irrépressible envie de s’enterrer quelque part. « Fais le sortir avant que je ne le tue ! » Il joignit le geste à la parole, menaçant directement Robyn d’une main, prêt à faire appel à la magie des ombres.

Elle adressa un long regard à l’homme qui l’avait élevé, peu encline à répondre quoi que ce soit à ce que son ami venait de dire. Au fond, il n’avait dit aucun mensonge. Il devrait apprendre à mettre les formes, cependant, car s’il parlait de cette manière au père de Fallon, il n’en ressortirait pas vivant. La rousse fit un pas vers son père, ses mains étaient retombées de chaque côté de son corps, tendues.

« — J’ai besoin de votre soutien, pas de vos remontrances, ni de vos attaques contre mes amis. J’ai, plus que jamais, besoin de faire confiance à quelqu’un. » Elle hésitait car elle ne voulait pas être véhémente comme l’avait été Robyn. « Je sais que cela part d’un bon sentiment mais vous ne pouvez pas me protéger. Sinon, où étiez-vous par le passé ? » Une pointe d’accusation et une lueur de défi dans le regard. « Je tiens tout de même à clarifier que j’ai effectivement la tête sur les épaules, et que je n’ai rien fait qui puisse me compromettre. » Même si elle l’avait désiré. « Je vous interdis de le menacer ou de le toucher à nouveau, ou c’est à moi que vous devrez faire face. » Grinça-t-elle avec une certaine autorité, insufflée par la colère qu’elle ressentait. Il n’était pas question de lancer une guerre dans la famille alors elle prit une grande inspiration pour se forcer à se radoucir. « Maintenant… Je suis ici chez moi, autant que vous l’êtes, Père. » Conclut-elle d’une voix qui n’attendait aucune réponse.

Elle défia son père du regard, furieuse, s’attendant à ce qu’il lui réponde mais l’homme se contenta de lui rendre ce même regard glacial. Les doigts de Robyn attrapèrent sa main lorsqu’il fit volte-face sans attendre une réaction du paternel furieux, l’emportant avec lui pour retourner dans la salle qu’ils avaient presque quitté, pour retourner s’asseoir sur le canapé et faire une remarque sur la folie des Twilis. Alors qu’ils rentraient dans la pièce, elle entendit son père jurer et s’enfoncer dans la grande demeure, ses pas s’éloignant. Il lui faudrait des jours pour se calmer. Le cœur de Midona était douloureusement serré lorsqu’elle se posa, attrapant un coussin qu’elle berça doucement entre ses bras, ses prunelles braquées sur Robyn et sa grande gueule.

« — J’avais un doute jusqu’à maintenant, mais j’en suis sûre désormais, tu es complètement fou. » Souffla-t-elle. « Le traiter de salaud, c’était un peu de trop, non ? Il reste mon père ! » Elle peinait encore à croire tout ce qu’il avait dit. « Tu vois tout ce que tu as fait là ? Je te conseille de ne jamais, plus jamais, le refaire ! » Elle secoua la tête, encore estomaquée. « Tout ce que tu as dit… » Ses joues s’embrasèrent et elle lui adressa un sourire timide. « …Je ne sais pas si j’ai envie de te frapper ou de t’embrasser. » Personne n’avait jamais oser tenir tête à son père.

@Robyn Patel

Elle était probablement folle de se confier à Robyn quand il était une passoire quand il s’agissait de garder les secrets et de tenir sa langue. Il ne lui avait pas non plus laisser le choix de ne rien dire puisqu’il avait lu dans son jeu, comme dans un livre ouvert. Elle ne pouvait qu’essayer de croire qu’il n’en dirait pas trop et qu’il n’irait pas clamer sur tous les toits, ses sentiments pour l’ainé des Hesediel. S’il le faisait, elle pourrait toujours clamer ses sentiments pour la sœur du même homme ! Cela lui apprendrait de ne pas garder les secrets de la Reine, tiens ! Mais Midona savait que si elle avait le malheur d’en dire un peu trop, toute cette histoire finirait par lui revenir dans la figure et elle ne désirait pas tellement risquer d’embraser toute la famille de celui qui occupait ses pensées. La rousse tenait toujours le coussin entre ses bras, le serrant contre sa poitrine, le front plissé d’hébétement à la suite des gestes impulsifs de son ami. Elle en entendrait parler, c’était certain. Au moins aurait-elle une raison de plus, de ne pas revenir trop souvent dans la grande demeure de sa famille.

La jeune femme souffla par le nez et, malgré la tension dans son corps, laissa échapper un sourire, bien qu’il soit un peu crispé. Ses joues se teintèrent un peu de rouge lorsqu’il répondit à sa phrase, à moins qu’elles n’aient pas vraiment repris leur couleur fade habituelle, à la suite de la longue tirade du Piaf. Elle était toujours un peu morte de honte et revoyait sans cesse le regard plein d’amertume, de haine et de jugement que lui avait adressé son paternel avant de faire volte-face en maugréant dans son menton des choses qu’elle n’avait pas eu le temps de comprendre. Elle était surtout étonnée que son ami soit toujours de ce monde, et c’était certainement grâce à elle s’il était encore là, à moquer le ton qu’avait eu son père face à lui. Midona se surprit à rire en réponse à ses mots. Un rire qu’elle dissimula bien vite en penchant sa tête dans le coussin, soudain mortifiée de se moquer de l’homme qui l’avait élevée.

« — C’est également mon toit ! » Rétorqua-t-elle avec un léger sourire quand elle releva la tête, se pinçant les lèvres en signe d’inconfort et d’embarras. « Tu ne vas pas me dire que tu n’y as pas pris goût ? Je ne t’ai pas vu te débattre. Il me semble même me souvenir que tu en as redemandé, la dernière fois. » Cette fois-ci, son sourire était plus franc, plus espiègle. Peut-être avait-il une mauvaise influence sur elle ?

Elle hocha lentement la tête à ses mots. Elle voulait y croire, qu’elle n’était pas faible et que tous les autres étaient trop fous pour en prendre conscience. Si elle était encore vivante aujourd’hui, c’était bien parce qu’elle avait plus de force qu’elle ne se l’imaginait. Que ce soit l’attaque de Ganondorf, le coup d’état de Xanto, ou plus récemment la tentative de meurtre dans le phare, elle y avait survécu. Et il n’était pas question qu’elle abandonne la partie si facilement. Elle n’était pas prête à abandonner tout ce qu’elle avait essayé de construire pendant ces cinq années de règne. Même si elle se sentait toujours terriblement ébranlée par la perte de sa Couronne et par l’absence de Fragment d’Ombre qui, à ses yeux, lui donnait toute cette légitimité qui lui manquait aujourd’hui. Cela pouvait sembler stupide aux yeux des autres. Ce n’était pas un vulgaire caillou qui faisait d’elle la Reine de Metzli. Mais il aidait grandement à l’hystérie collective. Pour le moment, tout allait bien… Mais, et si les choses devaient évoluer ? Comment ferait-elle pour retenir la violence de son peuple de se déchainer sur elle ?

« — Et pourtant, c’est par ma faiblesse que j’ai laissé les desseins de mon ancien conseiller gangrener mon Royaume. » Elle soupira. « Je ne peux pas m’empêcher de me demander ce qu’il serait arrivé si cet homme n’était pas apparu pour voler la Couronne des Ombres. Est-ce que Xanto aurait réussi à me destituer ? Est-ce que je serais dans une cellule ? Morte ? » Elle grimaça.« Je vais choisir de t’écouter, pour une fois. » Fit-elle. « J’ai envie d’y croire. »

C’est le moment que choisit le majordome pour revenir avec une autre tasse fumante de thé noir et des choux à la crème qu’il posa sur la table devant eux. Il adressa un regard en biais au Piaf lorsqu’il remplit sa tasse, puis un autre regard à la Reine donc le haut avait été tâché par le thé. Il marmonna à la Reine pour lui demander si elle avait besoin d’autres choses puis s’éloigna pour finir de nettoyer le sol quand elle secoua la tête. Midona le suivit des yeux jusqu’à ce qu’il disparaisse.

« — Tu as toujours su faire forte impression. J’espère que ta mère est plus sage, où Metzli sera perdu. » Elle aussi, était capable de faire des blagues. Et elle sentait qu’elle se détendait enfin.